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Quelques mots français, franglais ou anglais, leur usage commenté ou leur traduction, et des suggestions pour mieux les employer. Il s’agit d’une énumération non exhaustive de mots ou d’expressions qui ont présenté pour moi une difficulté ou une découverte, ou d’idées qui m’ont étonnée ou rendue perplexe, en majorité tirés de textes d’économie ou de management, souvent traduits ou inspirés de textes anglais. J’espère que cette liste hétéroclite aidera les lecteurs quand ils rédigent courriers, rapports, présentations, articles professionnels. Le langage est un continuel compromis entre usages et inventions. La négociation, inconsciente, est politique : il ne s’agit pas de dominer, mais de partager du sens avec des inconnus. Il faut lutter contre la tendance naturelle du management à se croire exempté de la grammaire, à se vautrer dans le jargon et les néologismes barbares, à s’autoriser de piètres inventions lexicales et à se dispenser de toute réflexion sémantique, bref à se croire malin parce qu’il parle un sabir guindé et emphatique qui paralyse la discussion et la pensée. Il faut aussi arrêter d’accuser l’anglais de polluer notre langue. On n’a pas fini de se faire envahir. Je me demande si après l’anglais, le chinois fera des percées aussi décisives dans la langue des affaires… Ce n’est pas l’impérialisme de langues étrangères ou exotiques qu’il faut dénoncer. Mais c’est à la méconnaissance et au désintérêt pour notre propre langue qu’il faut vigoureusement résister. On peut, même quand on présente un plan stratégique ou quand on parle de marketing, employer la langue commune sans la déformer, l’enrichir sans l’alourdir, la préciser sans se ridiculiser… Thérèse Sepulchre

  1. Dernière mise à jour le 25 janvier 2012

12 janvier 2006 | Lien permanent | Commentaires (4)

Abhorrer : détester. Ne pas confondre avec arborer : dresser, élever, porter ostensiblement, montrer ou encore afficher. En Belgique, signifie aussi « planter d’arbre ». J’aimerais voir l’homme arboré de tous dont un jour j’ai entendu un dirigeant parler.

Acceptation – acception : confusion fréquente et regrettable. L’acception d’un mot ou d’une expression, c’est le sens dans lequel on l’emploie, l’usage qu’on en fait. L’acceptation, c’est le fait d’accepter quelque chose, dans le sens de donner son accord, son consentement (plutôt formelle ou technique, l’acceptation).

Acquéreur : pas de féminin pour ce nom.

Acquis – acquit : encore une confusion fréquente. L’acquis, c’est ce qui est gagné, accumulé, élaboré, en parlant d’un savoir, d’une expérience, ou d’un capital... L’acquit, c’est la preuve qu’on a payé quelque chose. Au sens figuré, c’est l’acte par lequel on s’épargne un regret ou un remord (par acquit de conscience).

Acronyme : il s’agit d’une suite d’initiales de mots français ou étrangers, suite prononcée comme un nom ordinaire, par exemple laser (Light Amplification by Stimulated Emission of Radiation) ou ovni (objet volant non identifié). On voit que contrairement au sigle, (SNCF, HLM, HIV, bonjour, comment vous épelez-vous ?), l’acronyme se prononce comme un mot ordinaire. Il perd sa majuscule quand il devient un nom commun et prend généralement s au pluriel. Voir sigle et l’emploi des divers trucs et bidules pour embêter au maximum ceux qui vous lisent ou vous écoutent.

Acter : un manager qui se respecte ne note rien, ne mentionne rien, ne prend pas acte. Non. Il acte. Et parfois il confond avec décider, agir, bouger.

Actionnable : on devine qu’une décision actionnable ou une mesure actionnable sont l’une et l’autre susceptibles d’entrer en action, d’être mises en œuvre… Mais rien n’est moins sûr. (J’ai même vu un plan d’action actionnable !). Les Anglophones utilisent le mot « actionable » pour dire d’une chose, par exemple d’une injure ou d’une affaire, qu’elle est passible d’une action en justice. Cet emploi est correct, mais pas celui d’ « actionable » au sens de « susceptible of being put in practice », malheureusement chipé par certains Francophones mal avisés qui importent ainsi un anglicisme et une faute d’anglais. Il faut donc bannir le mot actionnable de son vocabulaire.

Adresser : non à l’utilisation dévoyée (merci, Thierry Do Espirito) du mot dans l’expression « adresser un problème » au lieu de « aborder une question », ou de « s’occuper d’un problème ». C’est l’anglais qui fait rêver avec son « address an issue ». On se figure un problème qui se promène et qui passe à portée de voix ; on lui hurlerait : « et, toi, viens ici tout de suite. Oui, toi, là, le problème avec ta tête à claque et ton allure chafouine. Tu vas voir ça, je vais t’apprendre, moi, à te balader, je m’en vais t’envoyer une de ces mandales… » Voilà comme on rêve de s’adresser aux problèmes.

Agenda : petit carnet de route, en papier ou électronique ; ne pas utiliser au sens anglais pour programme, ordre du jour d’une réunion. En revanche, le sens de calendrier me semble avéré (dates auxquelles on donne rendez-vous sur une semaine, un mois ou une année pour des manifestations, des réunions, des évènements).

Agile : rencontré dans un article de management : « Telle est la vocation de l’intelligence économique: une brique fondatrice de l’entreprise agile ». Avec Alphonse Allais, on pouvait s’attendre à un constat tel : "Le lapin est un mammifère agile et délicieux". Mais je n’avais jamais rencontré d’entreprise agile, surtout faite de briques. On notera l’ économie typique de la phrase de management, qui permet un recyclage permanent en remplaçant un seul de ses termes, la vocation de l’intelligence économique devenant par exemple celle de la stratégie d’entreprise – du marketing viral – de l’analyse comparative –des systèmes d’information, etc.

Agréer : agréer l’expression de mes sentiments respectueux, croire à mes sentiments respectueux.

Agressif : qui veut attaquer, blesser, critiquer ; menaçant, violent ou bagarreur. L’anglais « agressive » a un sens plus positif, moins teigneux. Pour le traduire, préférer dynamique, musclé, offensif…

Ahead : entendu ou rapporté d’entretien d’évaluation, jamais rencontré dans un écrit, mais ne saurait tarder. Je voudrais que vous restiez ahead ; tu n’es pas assez ahead (en langage managérial un peu plus ancien, signifie que la personne ainsi qualifiée n’atteint pas le niveau de performance souhaité).

Alternative : situation dans laquelle deux partis seulement sont possibles. Emploi critiqué : qui constitue une solution de remplacement, une autre possibilité, voire une échappatoire. Utiliser plutôt le mot option (mais bien sûr, tout le monde comprendra le mot alternative s’il vous échappe).

Ambages : toujours au pluriel ; affirmer sans ambages.

Ambigu, ambiguë, ambiguïté, ambigument.

Amont : mot qui caractérise le parler du manager, dont toute pensée coule nécessairement de haut en bas, ou plutôt se coule sur le modèle du processus. Quel que soit le point où l’on se trouve, on est toujours en amont ou en aval de quelque part. La réflexion en amont a facilité l’implémentation du projet : pas besoin de carbone 14, dans cent mille ans, on pourra précisément dater l’expression.

Antidote : nom masculin.

Antonyme (exercice de l’) : petit truc pour traquer l’insignifiance dans un texte. Il s’agit d’inverser le sens des phrases ou des mots et de peser la différence. La phrase de départ qu’on lit dans tous les rapports financiers (ou plutôt qu’on ne lit pas tellement cela fait bailler) :« Nos résultats sont tout à fait exceptionnels. Notre entreprise va bien, ça va même très bien. Les tendances sont toutes au vert... » . À la moulinette de l’antonymie sélective, cela donne : « les chiffres sont relativement médiocres. Notre entreprise ne va pas si mal que cela. Les chiffres ne sont pas tous au rouge... ». Du premier texte coule l’insignifiance. Le deuxième vous donne envie d’en savoir plus. Retournez au premier et retravaillez jusqu’à ce qu’il accroche l’attention. Quand le contraire d’une phrase (ou d’un mot) est plus consistant que la phrase elle-même, interroger son contenu, son intention ou se demander si le moment de la prononcer est bien choisi…

Apanage : toujours exclusif – donc pas la peine de le préciser.

Apogée : toujours au maximum – donc pas la peine de le préciser.

Arcanes : n.m., toujours au pluriel, dans le sens de mystère, de secret : les arcanes de la science, du pouvoir. Ne pas confondre avec arcades, même s’il y en a de très jolies.

Aréopage : n.m., assemblée de juges, d’experts, de personnalités. Aéropage n’existe pas.

Articuler : attention de rester dans le même registre métaphorique lorsqu’on utilise ce mot dans le sens d'organiser ou lier. Dans le Petit Robert, un exemple daté mais correct : « c’est autour de la charnière conflictuelle jeunesse-liberté / vieillesse-autorité que s’articule le conflit traditionnel dirigés-dirigeants » (on note charnière – articulation, etc.). En revanche, évitez ce genre de pâtés : "l'articulation des axes d'orientation du projet s'effectuera sous la houlette du pilote de la task force". Ne pas traduire l'anglais "articulate a vision" autrement que par "énoncer ou formuler une vision".

Assessment : utiliser à la place évaluation, par exemple dans les centres d’évaluations, qui remplacent les centres d’assessment.

Assertivité : affirmation de soi, confiance en soi (voir intelligence émotionnelle).

Assistant : attention quand on traduit ce terme de l’anglais, car il ne signifie pas forcément secrétaire, mais qualifie un cadre supérieur adjoint d’un responsable important.

Assurer – assumer : emploi de plus en plus fréquent comme verbes intransitifs. C’est marrant, mais familier. Et pas tout à fait interchangeable. Comparer : M . X assume, M. Y assure.

Attractif : ce qualificatif repris à l’anglais existe en français dans le sens d’attirant, attachant, captivant (métaphore de la force attractive de l’aimant) en parlant d’une chose ; mais l’emploi est très critiqué dans le sens d’attrayant, que l’on parle d’une personne ou d’une chose. On évitera donc des prix attractifs auxquels on préfèrera des prix attrayants. De même, on parlera d’un salaire intéressant, de conditions séduisantes, etc. On ne pensera même pas à l’attractivité d’une personne, mais éventuellement à l’attirance qu’elle exerce, à l’intérêt qu’elle suscite.

Au niveau de : voir niveau.

Autant que faire se peut : ce n’est pas très joli, mais autant l’écrire correctement.

Auto : dans les mots composés, est rarement suivi d’un trait d’union, même devant une voyelle, sauf devant e et i. Autosuffisant, autodétermination, autoroute, mais auto-immunité, auto-école, etc.

Autorité : encore une instance en crise chronique… comme la confiance. Mettez les crises d’autorité et de confiance sur une petite liste des lieux communs, clichés ou idées reçues à éviter ou à approfondir, et évitez les dans vos textes, vos discours ou vos conversations. Mais prenez aussi le temps de penser à ce concept, qui, comme le fait remarquer Michel Serres, est un grand tabou dans notre société. Le management le contourne prudemment et pour se faire entendre sur le sujet, parle de leadership, voir ce mot plus bas. Le mot autorité est-il condamné à se coltiner la crise ? Derrière la formule toute faite, il y a une réalité qu’il faut appréhender, en faisant appel à la notion de légitimité. Détient l’autorité celui qui est reconnu dans un statut ou dans un énoncé. Pour simplifier, je vais ramener le peuple des détenteurs de l’autorité à deux figures : le Pape et le scientifique. Le Pape est l’une des figures les plus parlantes de ceux dont l’autorité découle de leur statut ou de leur position : père et mère, maître d’école, instituteur, mais aussi astrologue, etc. Même si on ne croit pas en Dieu ou si on pratique une autre religion, le Pape a l’autorité de sanctifier quelqu’un, de décréter un dogme, de nommer des cardinaux, etc. Il est légitime aux yeux des personnes qui se disent catholiques, non par ce ce qu’il dit, mais parce que c’est lui qui le dit. L’autre figure de l’autorité est représentée par le scientifique. Lorsqu’un physicien déclare « dans des conditions définies de pression atmosphérique, l’eau pure bout à 100° », sa parole est légitimée par la certitude que derrière sa déclaration, s’exerce un processus de vérification. Pendant des siècles, la légitimité liée au statut a suffi pour fonder l’autorité. Elle continue à agir, mais l’apparition de la science moderne met« le ver dans le fruit ». La légitimité scientifique rend très difficile la légitimité du statut. Comme dans les systèmes monétaires, difficile de faire circuler deux monnaies différentes : la « mauvaise » chasse inexorablement la « bonne ». Pour justifier un ordre, rares ceux qui peuvent invoquer, comme le Pape, un « parce que je l’ai dit » ; il faut recourir à un problématique « parce que c’est vrai ». Le management, discipline moderne soumise à l’influence de la science, n’a pas l’autorité facile. Les managers, derniers nostalgiques de la papauté ?

Avatar : signifie toujours « métamorphose », « transformation radicale ». Et jamais ennuis, contretemps, mésaventure. Les avatars d’une entreprise, ce sont ses changements de forme, de nom ou d’activités. Il est vrai que cela signifie souvent maux de têtes, insomnies, et problèmes de toute sorte. Ce n’est pas une raison pour confondre avatar et (mauvaise) aventure.

S’avérer : se montrer à la lumière de l’expérience, ou de la réflexion. Se révéler réellement. Les puristes dénoncent son emploi dans l’expression « s’avérer vrai », ou « s’avérer faux ». Il n’y a pourtant pas vraiment d’erreur logique à l’utiliser dans ce sens. Mais si on n'aime pas se disputer avec les puristes, on peut écrire "se réveler faux".

12 janvier 2006 dans A | Lien permanent | Commentaires (3) | TrackBack (0)

Background : prononcé par un Français, le mot donne l’impression que ce dernier est enrhumé. Apparemment, la difficulté de prononciation n’empêche pas le terme anglais d’être utilisé, il est sans doute plus chic et moins gênant quand on veut parler de l’origine de quelqu’un, de son milieu familial et social ou de sa formation. Les managers ont une fâcheuse tendance à utiliser l’anglais pour aseptiser le langage de certains embarras et de gênes sociales. Pour faire du bon fromage, rien ne remplace pourtant le lait cru, et surtout pas le lait UHT bourré d’additifs. Quand on parle de quelqu’un et que l’on désire évoquer ses origines ou son milieu, utiliser des périphrases (sa formation, son milieu d'origine, son histoire, etc.) plutôt que des entourloupettes lexicales ; et quand il s’agit d’un événement ou d’une institution, dire contexte ou lieu de bagroud, à vos souhaits, merci.

Baruya : voir posture épistémologique des consultants

Base de clients : pourquoi faire laid quand on peut faire net en disant clientèle ou fonds de commerce, ou encore plus simple et plus joli, en disant simplement clients. Réserver l’expression quand on parle des fichiers ou des programmes informatiques où l’on compile des millions d’informations selon les méthodes de la "gestion de la relation client" ou "Customer Relationship Management".

Benchmark, benchmarking : tout le monde comprend « analyse comparative ». Pourquoi ne pas le dire ? D'autant que la prétention du vocable anglais ne masque pas toujours l'inanité de la prétendue comparaison : de simples études de marché sont parfois vendues très cher comme des benchmarks.

Bilan : confusion inacceptable avec le mot résultat, et d’autant plus que tout manager qui se respecte devrait avoir des notions de comptabilité, langage splendide des affaires. Un bilan présente une comparaison entre un actif et un passif, d’une société, et par extension littéraire, d’une personne politique ou d’un groupe d’action. Un résultat est une somme (ou une soustraction), notamment entre les deux colonnes du bilan (perte ou profit). Je veux bien entendre l’erreur d’un journaliste parlant du « bilan » d’un accident, mais pas la faute d’un manager parlant du « bilan d’une situation». S’il confond bilan et résultat, c’est vraiment qu’il n’a rien compris à ses affaires.

Blanchissage : apparemment, les banques lavent toujours plus propre. En tout cas, j’ai entendu dans les remugles de l’affaire Clearstream un journaliste parler du blanchissage d’argent sale (au lieu de blanchiment ).

Bluffer : à la première personne du pluriel du subjonctif imparfait, la forme est « que nous bluffassions » . Que le ciel me donne une occasion, une seule, de l’employer, et que je puisse dire à mes petits enfants : "du temps que j’étais jeune, il s'en est fallu de peu que jamais je ne me bluffasse".

Boîte à outil : plus les concepts sont abstraits, plus les méthodes sont éthérées, plus le manager aime parler de sa « boîte à outil ». Pas d’inquiétude, il ne vous la montrera JAMAIS. Ce n’est pas qu’il est jaloux. Il n’a pas non plus peur que vous les lui piquiez, ses précieux outils. Il ne vous la montrera jamais parce qu’elle est insaisissable, mais il vous en parlera, il sera même intarissable sur le sujet. C’est un vrai bric-à-brac de trucs, de gadgets, de machins… Mais le manager a la nostalgie de l’établi, de l’atelier, de la « vraie réalité concrète ». La boîte à outil est une pure métaphore qui veut donner l’illusion de la proximité du management à la réalité. Malheureusement cette proximité n’est jamais donnée d’avance.

Booster : augmenter (ses ventes), doper (son chiffre d’affaires), remonter (le moral de ses troupes) … Booster fait très jeune manager dynamique, mais le mot vieillira sans doute très vite…

Brainstorming : le terme français recommandé par le ministère de la culture est remue-méninges. Nunuche. Ils ont dû en passer des séances de brainstorming pour trouver ce mot.

Breakeven : le mot français est « point mort » ou « équilibre ».

B to B : évoque irrésistiblement Brother et Brother (je sais, cela n’a rien à voir), dont tant de directions de communication semblent s’inspirer pour rédiger leur plaquette en quadrichromie. Texto : Nos missions : nous adressons les problématiques clients afin d’implémenter des dispositifs transversaux opérants et structurants et les aidons ainsi à développer leurs potentiels de valeur ajoutée Notre vision : B & B est animé par la conviction que les enjeux de demain se préparent aujourd’hui . B & B dans le monde : B&B est présent partout dans le monde sur les quatre continents développés.

Traduire "B to B" : tout le monde comprend, mais on peut dire en français commerce ou service interentreprise.

Budgétiser a remplacé budgéter (ce dernier est correct, mais ne s’emploie plus).

Business model : modèle économique, modèle d’affaires. L’emploi d’un anglicisme doit automatiquement déclencher le réflexe de « chercher l’élément qui gêne ». Celui qui parle de business model au lieu de dire simplement modèle économique veut certainement en dire plus sans oser ou sans pouvoir le dire. Il pense sans doute à toutes les astuces dudit modèle pour truander, entuber, farcir les dindons que seront forcément ses clients, ses fournisseurs, ses salariés voire ses actionnaires ou encore la communauté toute entière (corrélat presque obligé de ce non-dit et peut-être même non pensé, mais présent dans l’inconscient managérial, à un moment ou à un autre de l’exposé ou de la conversation, un "rapport win-win" viendra opportunément se glisser).

Business system : filière d’activité, chaîne de valeur.

12 janvier 2006 dans B | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Débouler : se dit joliment à la bourse ou sur les marchés ; quand on parle de débouler sa position, on veut dire réaliser des gains à la vente ou à l’achat d’actifs financiers.

Débriefer, débriefing : ces mots se sont fort bien intégrés en français (on note l'accent). C’est curieux, malgré l’usage répandu et attesté de ces expressions, des managers qui ne se gênent pourtant pas pour employer task force, teamwork, workshop et d’autres mots horribles qui ont d’excellents équivalents français, ces mêmes managers s’obstinent à contourner débriefing et à parler d’entretien de restitution, d’échange ou de partage de ressentis, et autres expressions nunuches.

Décideur, décideuse : le mot est attesté dans les dictionnaires, mais son utilisation semble coincée dans un tout petit cercle (celui des décideurs, justement, ou des directions de communication) ; ne s’utilise pas à la machine à café, ou alors employé par dérision, moins pour désigner quelqu’un qui a un pouvoir discrétionnaire que quelqu’un qui s’y croit. Éviter de l’employer comme nom. Dirigeant est beaucoup plus usité. Mais ne se rencontre pas souvent au féminin, faute simplement d’effectifs de dirigeantes, car cela se dit parfaitement. En revanche, ne pas hésiter à utiliser décideur ou décideuse comme adjectif ou décidément comme adverbe.

Décompter ou compter : attention, les deux mots ne veulent pas dire la même chose. Décompter signifier déduire, soustraire d’un total. Compter, c’est faire le compte, dénombrer… Quand on compte ses effectifs, on ne les décompte pas forcément.

Dédier, dédicacer : un auteur dédie son ouvrage à quelqu’un par une dédicace imprimée (sur la première page du livre, sur la pochette du disque, etc.). Si l’inscription est manuscrite, il dédicace son ouvrage à un ami, un lecteur fidèle, un fan, etc. On dit aussi : dédier ses efforts, sa peine à quelque chose, comme synonyme de "consacrer, vouer, donner, offrir, dévouer". On est parfois surpris , comme Dominique Michel, de rencontrer des « espaces dédiés à la musique » au lieu d’y être simplement consacrés, ou des caisses de supermarché « dédiées » à tels ou tels clients. Et pourquoi pas des caisses dédicacées, tant qu'on y est ? Ecrire « destinées à » ou « réservées à » ou « conçues spécialement pour » ou « spéciales pour « …. Cet usage très discutable de « dédier » est tellement moderne, sacralisant le commerce. Il nous vient sans doute à la fois de l’anglais dedicated et de l’informatique. Evitez, évitez si vous le pouvez.

Dédoubler : voir doubler plus bas sur la même page.

Démontrer : prouver, argumenter, aboutir à une conclusion par un raisonnement actif. On l’emploie souvent à tort pour gonfler le sens de montrer, qui signifie dans le même contexte le fait de révéler un fait, de le mettre en lumière, sans nécessairement aboutir à une conclusion ou à un plan d’action. Comparer : « le chef de projet a démontré la nécessité d’allonger le budget » et « le chef de projet a montré toutes les difficultés de la réglementation concernant le respect des dates de livraison ».

Démultiplier : certains utilisent ce verbe à la place de multiplier. Pourquoi ? Pour en faire plus? C’est surtout en faire moins en ce qui concerne la langue et le sens, et en faire trop en ce qui concerne la communication. L'erreur vient sans doute de la confusion avec le mot décupler, qui signifie multiplier par dix et par extension, augmenter considérablement. Démultiplier, c’est réduire la vitesse d’un mouvement transmis (comme dans un moteur). Au figuré, cela veut dire augmenter les effets en multipliant les moyens employés. Ce qui ne signifie pas forcément augmenter l’efficacité. Voir aussi emploi abusif et abscons de dédoubler…

Aux dépens de : toujours au pluriel. « Aux dépends de » n’existe pas.

Délivrable, livrable : employés comme substantifs (au masculin), sans doute empruntés à l’anglais delivery, action de livrer, de produire, d’émettre, de fournir. Pour ne pas fâcher l’Académie française, et surtout pour se faire comprendre, on évite la tournure si on peut et on essaie selon le cas production, prestation, livraison, émission, fourniture, etc.

Développement durable : les deux mots sont en train de se fondre dans l’expression brûlante d’actualité médiatique et politique. En espérant que cela n’est pas un feu de paille. Du point de vue sémantique, l’expression me pose de petits problèmes. Que serait par exemple un développement qui ne serait pas durable ? Du développement provisoire ? temporaire ? transitoire ? précaire, réversible ? Des relents de pléonasme embrument le concept et son expression.

Développer : quand on développe une théorie, un argument, un plan, ou sa pensée, on l’expose en détail, on l’étend, on l’étaye et on l’élargit. Ne pas employer ce mot au sens d’élaborer, d’établir, de préparer un plan, un argumentaire, etc.

Dilutif : se dit en finance de ce qui diminue le bénéfice net par action (effet dilutif d’une augmentation de capital). Réserver ce mot pour les textes techniques ou savants.

Discret : le mot peut signifier « réservé, délicat » comme il peut signifier « séparé, discontinu ». Attention, l’anglais distingue les deux sens par deux mots différents : discreet dans le premier sens, discrete dans le second.

Diversité : son évocation dans les discours politiques ou les présentations de manager a le singulier pouvoir de faire rentrer sous terre toute velléité de différence. La diversité est un nom commun de la conformité.

Doubler ou dédoubler ? doubler, c’est rendre double. « doubler le chiffre d’affaires ». Dédoubler, c’est partager en deux. Ne pas dire que l’on a dédoublé ses bénéfices pour signifier qu’on les a multipliés par deux. La confusion vient sans doute de l’usage de « dédoubler un train » = en faire partir deux, notamment en cas d'affluence de passagers.

Downloader : télécharger, copier, pirater.

Downsizer : ouf, encore un mot que l’on rencontre de moins en moins souvent. Bon débarras. On peut toujours traduire par réduire la voilure. Tailler dans la mauvaise graisse a un certain succès, mais n’est absolument pas recommandable si vous voulez faire carrière dans la fonction publique. Restructurer a pris définitivement le sens sinistre qu’on lui accole désormais, à tel point qu’on ne peut plus parler d’euphémisme.

Dress code : encore un exemple d’expression anglaise employée par euphémisme. En français, code vestimentaire est compris comme uniforme, alors qu’en utilisant dress code, personne ne semble se compromettre. Pfff.

Dû : participe passé de devoir ; déclinaison spéciale et déconcertante : dû, due, dus, dues.

Durable : pour traduire en anglais l’expression développement durable, utiliser « sustainable » et non pas « lasting ». Certains mots ont de ces destins sémantiques. On souhaite à durable de durer.

12 janvier 2006 dans D | Lien permanent | Commentaires (1) | TrackBack (0)

Échappatoire : deux p.

Émergent : semble avoir remplacé « en voie de développement » en parlant des pays ou des économies. C’est que le développement est réservé à l’expression qui lui accole durable, donc émergent évite de se répéter quand on parle, par exemple, du développement (durable ou pas) des pays émergents. On me corrige toujours la copie quand j’emploie le mot car je ne peux pas m’empêcher d’écrire émergeant, ce qui est une erreur.

En charge de : pourquoi pas chargé de ?

Enjoindre : les dictionnaires donnent ce verbe comme transitif ; il faut donc enjoindre quelque chose (un ordre, un commandement, une mission, etc.) à quelqu’un. On voit souvent la construction bizarre et fausse : enjoindre quelqu’un de faire quelque chose. Évitez, et si vous n’êtes pas à l’aise avec ce tour, utilisez un autre verbe : recommander, prescrire, intimer, sommer, ordonner expressément, etc.

Effectuer : faire, exécuter, réaliser une opération complexe ou délicate. Évitez d’effectuer une recherche, un transfert, une promotion dites plutôt mener une recherche, faire un transfert ou une promotion, etc. (Voir faire).

Efficience : longtemps, j'ai cru que le mot ne disait pas autre chose que « efficacité ». Je voulais même être pendue, d'avoir entendu un manager prononcer vertueusement : « plus que l’efficacité, c’est l’efficience que je cherche à mettre en place » et d'avoir pensé qu'il avait un peu trop forcé sur le séminaire de motivation (le manager questionné n'avait pas pu définir la nuance. L’anglais « efficiency » se traduit apparemment par efficacité ou efficience, selon le contexte. Il y a bien une différence, et je regrette non pas mon ignorance, mais ma conviction, ma prétention, ma cuistrerie. Voici ce que j'ai entendu dire par un inconnu dans un train et que je rapporte ici (sans pouvoir nommer cette personne ou la remercier de me permettre de mourir un peu moins bête) : l’efficacité mesure un résultat - si vous avez atteint les objectifs que vous vous étiez fixés, ou que d’autres avaient fixés pour vous, vous vous êtes montré efficace. En revanche, l’efficience mesure un ratio : si vous avez atteint l’objectif et que vous avez optimisé l’utilisation des moyens que vous avez mis en œuvre pour l’atteindre, vous vous êtes montré efficient.

Emphase : ne pas mettre l’emphase sur un point, mais mettre l’accent.

Enduire d’erreur : voir induire.

Entrepreneur : dans la géographie des termes du management, il faut bien reconnaître la domination de l’anglais. La liste des termes empruntés à d’autres langues est bien maigrelette. Mais le seul terme d’origine française n’est pas le moindre. Les Américains parlent d’entrepreneur en mâchouillant et avalant tout rond le r, mais le terme n’a pas d’équivalent anglais pour parler d’une activité dans laquelle une personne ou une équipe se lance, organise et dirige en assumant le risque et avec l’idée d’en tirer un profit, quel que soit celui-ci. Je ne pardonne pas aux managers français, qui ne sont pas d’ailleurs pas forcément entrepreneurs, de s’arroger le droit de parler d’entrepreneurship parce qu’ils ne sont pas fichus d’une minute de réflexion sémantique, d’exactitude linguistique et d’imagination lexicale. Il faut dire, selon le contexte, esprit d’entreprise, capacité d’entreprendre ou entreprise tout court… Les romans anglais, russes et italiens, notamment du XIXe siècle, traduits en français sont émaillés d’italiques ou d’astérisques en français dans le texte. Les langues s’empruntent copieusement des termes étrangers dont leurs équivalents ne sont pas aussi riches. C’est une question de sens, d’échanges, d’invention également. Le management peut ainsi s’enrichir, et enrichir le français, de mots qui traduisent de nouveaux concepts et de nouvelles pratiques, ou qui disent plus vite et plus vivement des notions un peu éculées ou vieillies. Management dit plus qu’administration ou gestion. Leadership remplace autorité et en dit à la fois plus et moins. Mais je cale pour des termes employés par paresse ou par snobisme comme entrepreneurship.

Espace : nom féminin quand il désigne le blanc placé entre les mots et les lettres (que l’ordinateur calcule tout seul avec les merveilleux logiciels de traitement de texte, mais que les typographes traitaient savamment quand la composition se faisait encore à la main, espace fine, espace forte). Il faut dire et écrire : un feuillet de 1500 signes espaces comprises.

Espace : les années 50 ont baptisé à la pelle les boulevards et les places de Charles de Gaulle ou de Division Leclerc. La fin des années 90 a vu le foisonnement de lieux publics transformés en autant d’espaces… À quand trajectoire pour remplacer avenue ?

Éthique : voici un mot dont la trajectoire s’est curieusement incurvée aux abords de l’entreprise. Du grec « ethos », il signifie exactement la même chose que morale ; mais son emploi n’est pas le même. Éthique est sérieux ; morale ennuie. La morale renvoie à des obligations. L’éthique renvoie à des valeurs. Il n’y a pas photo, comme me le faisait remarquer élégamment un consultant en communication. En entreprise, avez-vous jamais rencontré une charte morale ? Comme les feuilles mortes, les chartes éthiques se ramassent à la pelle. Il y a quelques mois, un examinateur à l’oral d’un grand examen d’entrée pour un MBA prestigieux dans une grande nation démocratique avait prié un candidat de lui présenter un problème éthique personnellement vécu. Le candidat avait beau chercher, il ne trouvait pas dans sa mémoire un élément susceptible de lui rappeler qu’il était passé par un état pareil. Non, il ne voyait pas. Il n’avait jamais rencontré de « ethical issues » qu’il avait dû « tackle » ou « address » (l’examen se passait évidemment en anglais)… Il était même surpris qu’on lui pose la question, comme si l’on mettait en doute son intégrité. « Mais enfin, s’est énervé l’examinateur, vous n’allez pas me dire que dans votre travail, vous n’avez jamais rencontré une situation, par exemple, de conflit d’intérêt ». « Ah, répond le candidat visiblement soulagé d’avoir compris ce qu’on lui demandait, bien sûr : je travaille dans un cabinet de conseil et parfois je me demande si mon éthique m’autorise ou non à investir dans des entreprises que je conseille ».

Évoquer : synonyme d’invoquer dans le sens d’appeler, de faire apparaître par la magie, comme dans « évoquer les démons ». Par ailleurs, évoquer signifie 1. à la mémoire - 2. faire apparaître à l’esprit par des images et des associations d’idées - 3. mentionner - 4. faire penser à en parlant de choses.

Exaucer : accueillir favorablement (une requête, un désir). Ne pas confondre avec exhausser, surélever.

Executive : voir décideur. Se traduit selon le contexte par « cadre dirigeant», par le modifiant « en chef », et même gadget (un executive toy, c’est un truc pour se calmer les nerfs).

12 janvier 2006 dans E | Lien permanent | Commentaires (4)

Fameux : l’adjectif est souvent superflu ; avant de décréter que quelqu’un est fameux, ou que quelque chose est réputée, demandez-vous s’il ne vaut pas mieux laisser le lecteur juger par lui-même. La même remarque vaut pour les qualificatifs admirable, excellent, remarquable, historique, etc.

Cela le fait : jolie expression familière pour exprimer « c’est juste, pertinent » ; bien sûr, ne s’écrit jamais ; ne se dit pas non plus sous la forme « cela l’effectue », entendue dans la bouche de jeunes cadres un peu trop dynamiques…

Fidèle : on est fidèle en amour comme en affaires. Dans ces matières, laisser la loyauté à l’anglais. Loyauté en français est plus proche du sens de fair-play en anglais.

Finaliser : et pourquoi pas terminaliser tant qu’on y est ! Conclure une affaire, boucler un dossier, finir un texte, terminer un projet, etc.

Focaliser : se dit très bien pour « concentrer », par exemple « focaliser son attention ». En revanche, le terme focus n’existe pas en français. Mettre le focus sur (de l’anglais) = se concentrer sur. Attention, en parlant d’une personne, le terme anglais « focus » peut vouloir dire « concentration » ou « détermination ». Le contexte ne permet pas toujours de trancher.

Être fort de : fort s’accorde. Forte de son expérience, elle s’est lancée dans l’entreprise.

Se faire fort de : fort ne s’accorde pas. Elle se fait fort de ….

Foudre : masculin dans le foudre de Jupiter ou un foudre de guerre. Féminin dans le coup de foudre ou dans les foudres qu’il s’est attirées du pouvoir.

Frankenstein : nom du créateur, pas du monstre. Le professeur Frankenstein se prénommait Victor. Le monstre n'a pas de nom. C'est un innommable.

Fringe benefits : voir incentives

Fruste : malheureusement on ne peut pas dire ou écrire de quelqu’un qu’il est « frustre », on est obligé de dire qu’il est rustre (grossier), fruste (inculte), et peut-être même frustré. D’autres contractions entre des mots évocateurs sont aussi ravissants qu’incongrus : ignare et opiniâtre donnent ignâtre, forcené et forçat donnent forcenat, etc.

Full-time : à plein temps (adverbe) ou un plein-temps (nom masculin, notez le trait d’union). Il travaille à plein temps ou à temps plein. Il a un travail à temps complet ou un plein-temps. L’anglais n’a ici aucun apport sémantique, sinon celui de transformer celui qui l’utilise en poseur.

12 janvier 2006 dans F | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Géographie des mots du management : à part quelques mots venus du japonais, je n’ai pas rencontré beaucoup d’expressions importées d’autres langues que l’anglais (à part un des mots les plus importants du vocabulaire du management, le français entrepreneur, cocorico et voir à cette entrée). Les emprunts aux autres disciplines sont également assez localisés et datés : sciences dures au début du siècle, sociologie molle et surtout psychologie plus récemment. Le management dans d’autres langues fait-il des emprunts ailleurs qu’aux Anglo-Saxons ? Quelle discipline s’inspire-t-elle du management ? Qui emprunte au management ?

Gérer, gestion : il y a un livre à écrire sur la carrière de ce mot en-dehors de l’entreprise et de l’économie. Si gérer ses affaires, ses intérêts sont des tournures parfaites, si gérer son temps, ses priorités sont des locutions acceptables et courantes, il faut éviter en revanche « gérer son équipe, ses sentiments, ses émotions, sa famille, ses amis ». Quand on essaie de trouver un synonyme à ces expressions à partir du contexte, on tombe sur la curieuse traduction : « rendre supportable ». Gérer ses amis, c’est les empêcher de gêner ; gérer son équipe, c’est veiller à ce que les relations ne s’embrouillent pas, etc. L’expression rendre supportable est plus juste, mais personne ne l’emploie et tout le monde semble préférer gérer, plus professionnel, plus dynamique, plus positif et surtout plus court. Moi je n’aime pas ce mot pour décrire des relations. Dans le sens premier, le terme recouvre en effet une notion d’économie : gérer une affaire ou gérer son temps, c’est allouer, ou chercher à maximiser l’utilité, des ressources ou des moyens rares à des besoins ou des fins illimitées ou indéfinies. Quand il s’agit de sentiments ou de relations, je bascule dans l’incertitude, la complexité et le flou, mais je ne me coltine pas avec la rareté (le problème est d’ailleurs souvent la profusion). Donc j'évite de gérer mes relations, mes enfants et mes collègues, mais j'essaie de les garder à la distance nécessaire pour qu'ils restent supportables (NB : dit comme cela, c'est affreux, je me demande si je ne vais finalement pas m'en tenir à les gérer).

Globalisation : un terme fourre-tout, convenu et vague ; tout le monde semble s’y retrouver pourvu que personne ne s’avise à le définir. Chacun voit la mondialisation à sa porte, mais apparemment personne n’aperçoit le seuil de son voisin. Défi pour les uns, opportunités ou menace pour les autres, les discours varient selon les interlocuteurs. Chacun a une expérience à raconter. Mais personne ne semble s’accorder sur le phénomène. Le terme de multinational semble vieilli et est de plus en plus souvent remplacé par mondial ou global. C’est le journalisme et la politique qui déteignent sur le management. Voir mondial.

Grenelle : … de l’environnement, de l’éducation... Le mot désigne aujourd’hui toute réunion de décideurs et d’experts rassemblés pour mettre à plat les problèmes et décider de grands plans d’actions… Le terme vient des accords du même nom : en plein mai 68, une commission réunissant gouvernement, représentants du patronat et responsables syndicalistes décide, entre autres, d’une augmentation de 25 % du smig. Le mot n’est pas au Petit Robert des noms communs, pourtant il s’emploie de plus en plus, par emphase ou par analogie, dans la presse et dans le management. Question : faut-il une majuscule ou non ? Moi, je n’en mettrai pas, mais inutile de convoquer un grenelle pour autant…

Guillemets (utilisation des) : tout le monde n’a pas le temps de lire l’excellent ouvrage de Olivier Houdart et de Sylvie Prioul : La ponctuation ou l’art d’accommoder les textes (Seuil, 2006). C’est dommage, car ce livre fourmille de traits de génie, de rappels salutaires et de modes d’emploi des éléments qui sont le sel et les épices de l’écriture. En ce qui concerne les petits crochets, les auteurs rappellent la manière de les employer (toujours par deux, et synonymes « visuels » des caractères italiques) et à quelle occasion (pour les citations, les paroles rapportées, les surnoms, les autonymies, les mots qui s’écartent du registre du texte, ceux que l’auteur n’assume pas pleinement, etc.). Dans la conversation, on voit de plus en plus l’expression physique de la mise à distance de celui qui parle par rapport aux mots qu’il prononce, avec ce petit geste horripilant pour certains, contagieux pour d’autres : un ou deux doigts de chaque main levée griffant l’air deux fois au moment de la prononciation du terme ou de la locution ainsi encadrés. C’est un des seuls exemples à ma connaissance d’expression corporelle empruntée à l’écriture. Une autre façon de se mettre à distance de son texte ou de sa parole consiste à prononcer les mots en anglais ou en franglais : background, value for money (en parlant d’une prestation intellectuelle), downsizer, les mots et les expressions foisonnent. Plus qu’une mise à distance, leur utilisation rend parfois manifeste un malaise. Qui me met singulièrement mal à l’aise.

12 janvier 2006 dans G | Lien permanent | Commentaires (1) | TrackBack (0)

Historique : laissez les historiens juger de ce qui est historique, pas les commentateurs modernes, et évitez de qualifier d’historique tout ce qui vous paraît remarquable. C'est un conseil que j'emprunte à l'ouvrage Style Guide, publié depuis 1986 par The Economist, qui compile tous les trucs et les préceptes suivis par l'équipe de l'hebdomadaire britannique dans la rédaction, la relecture et l'édition de leurs articles. Sous des abords très techniques, l'ouvrage est une mine de trésors éditoriaux, à peine plus sérieux et complet que le petit lexique que vous lisez ici mais infiniment plus anglais. Notez qu'il n'est pas moins fouillé et relu (avec amour, trente-six-mille fois). Bon, ils sont cent cinquante à la rédaction, sans compter les correspondants étrangers qui participent au Style Guide. Moi, je suis toute seule. Avis aux intéressés...

Holisme : ce mot a sévi. Il a en effet longtemps empâté les discours du management, dans lesquelles toute approche d’un problème était nécessairement holiste ou holistique. Du grec holos (entier, complet), le mot a été forgé, d’après le Dictionnaire historique de la langue française, au vingtième siècle par un biologiste anglophone qui désignait ainsi « la théorie selon laquelle l’homme est un tout indivisible qui ne peut pas être expliqué par ses différents composants isolés les uns des autres ». Une approche totalisante voudrait dire à peu près la même chose dans un langage moins didactique, mais la proximité avec l’inquiétant adjectif totalitaire a sans doute empêché la construction. Holiste est formé sur le grec holos, holistique sur l’anglais holistic. Dans tous les cas, il s’agit de termes didactiques, savants, utiles dans des registres bien définis de la langue, mais dont adore s’emparer le management : en effet, ces mots permettent de concilier l’imprécision et la suffisance. Global, aussi emprunté de l’anglais, a remplacé holiste mais dans un sens tout différent, comme synonyme de mondial, ou plus précisément de mondialisé. Le terme a presque évincé multinational, de moins en moins rencontré.

Honorer, déshonorer, honoraire, etc. (un seul n). Mais honneur (deux n).

Hop, hop, hop : je ne l’ai jamais vue écrite, mais l’expression s’entend de plus en plus au bureau, au magasin, sur les chantiers, à l’atelier, dans les réunions… Au royaume des blonds…

Hot line : se dit hot line. Féminin. S’écrit parfois hot-line. Des hot-lines. Service d’assistance téléphonique ne passe pas (peut-être parce qu’il y a assistance, et que franchement, toutes les hot-lines ne sont pas au point sur ce point).

12 janvier 2006 dans H | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Idée reçue : en tête des idées reçues, caracole l’idée selon laquelle les idées reçues sont ineptes, toxiques, fausses et ridicules. À la fois éteignoirs de la pensée, et flaques de boue où pataugent les conversations. Après : « demain, j’arrête la langue de bois », on entend les prescripteurs du bien parler proclamer : « demain j’arrête les idées reçues ». Encore une promesse d’ivrogne, ou une de ces bonnes résolutions rarement tenues au-delà du 10 janvier, le plus souvent oubliées dès le 15 du même mois. D’abord, chasser les idées reçues est une partie d’autant plus difficile que la plupart passent inaperçues ou sont insaisissables. D’ailleurs, essayez de trouver un exemple d’idée reçue, là, tout de suite. Votre cerveau ne répond pas. C’est qu’elles s’y promènent incognito, indélébiles, mais indétectables. Il n’est pas marqué : « attention, idée reçue, danger, à remettre en cause d’urgence ». Bien sûr que non. Tout le monde ne s’appelle pas Flaubert et n’a pas le talent de repérer et de présenter savamment mélangés : bonnes idées vraies mais éculées, fausses évidences, clichés, dérapages du bon sens, affirmations invérifiables, fantasmes « raisonnables », brèves de comptoirs, hypothèses scientifiques non vérifiées, etc. Si on n’y échappe pas, attention cependant à ne pas se laisser étouffer par les idées reçues, qui sont la plupart du temps d’anciennes bonnes idées passées dans le langage commun. Dans les articles et les discours de management, il en faut, mais point trop, et surtout, pas trop usées. Par exemple, évitez la concurrence (toujours plus rude), le changement (toujours plus rapide, plus complexe et plus changeant), la mondialisation (toujours plus mondiale), le coût du travail (toujours plus cher), etc. Il en faut cependant, car sans une ou deux, la pensée ne pourrait pas se reposer, l’attention ne pourrait pas se relâcher, l’argumentation épuiserait votre lecteur ou votre public. En fait, les idées reçues sont les sièges de l’intelligence : elles permettent de se reposer dans un exposé ardu, une démonstration compliquée. Mais gare à l’encombrement ! Si votre salon est bourré de chaises, fauteuils, poufs, canapés, impossible d’y circuler ou d’échanger. Évitez d’empiler des sièges ou des idées reçues à l’entrée de votre salon ou de votre discours, pour ne pas gêner vos invités et vos lecteurs. Mettez juste le nombre nécessaire, pour reposer sans encombrer, pour assurer le confort en gardant éveillé.

Innommable : voir Frankenstein.

Implémenter : c’est mieux de dire ou d’écrire mettre en œuvre, appliquer. Mais les managers s’obstinent année après année à implémenter le changement, d’ailleurs souvent après une période de kick off (= lancement du projet) conduite par le steering committee (comité de pilotage), tout cela bien sûr pour créer de la value.

Incentive : traduire par prime, avantages en nature, rémunération en nature, intéressement, cadeau d’entreprise.

Induire : induire quelqu’un en erreur, c’est le pousser volontairement ou non, par mensonge, omission ou information erronée ou incomplète, à se faire une idée fausse… Enduire quelqu’un d’erreur, c’est le rouler dans une espèce de plâtre, de colle ou autre enduit, jusqu’à ce qu’il en soit couvert par couches épaisses. Comme on voit, ce n’est pas la même chose. Alors n’enduisons personne d’erreur et ne nous laissons pas enduire d'erreur ou d'autre chose …

Industrialisé : participe passé du verbe industrialiser : exploiter industriellement, équiper d’industries… Un pays industrialisé, une économie industrialisée, etc.

Industriel : adjectif, qui se rapporte à l’industrie : activité industrielle, produit industriel, friche industrielle, aliments industriels, zone industrielle, etc.

Industry : le terme anglais se traduit rarement par industrie, mais plutôt par secteur d’activité, branche de l’industrie, filière.

Influer : est moins concret et moins précis qu’influencer. Les deux verbes sont très proches dans ce sens, mais ne se construisent pas de la même manière. Influencer est transitif direct ; influer se construit avec sur (influer sur le cours des choses) qui est lourd et peu gracieux. "On n'a pas encore déterminé si oui ou non la météo influait sur le cours de bourse" (dire plutôt : ... si la météo avait une incidence sur ... ").

Initiation (de mesures) : ce mot, quand il ne signifie pas l'action d'initier à des mystères ou à des rites, est un horrible franglais qui doit se comprendre et être remplacé selon le cas par engagement (de réformes), mise en œuvre, démarrage (d’un programme ou d'un projet) …

Innovation : le Dictionnaire historique de la langue française donne les racines du mot qui emprunte au latin classique innovare, « revenir à » et au bas latin, « renouveler ». Le mot se dit à partir du XVIe siècle d’une chose nouvelle et s’applique spécialement au domaine de l’industrie et des affaires. Si on s’en tient au mot, l’innovation est le résultat d’un changement, d’un renouvellement, d’un recyclage. Les expressions « innovation de rupture » et « innovation incrémentale » devraient donc en toute rigueur être évitées au titre d’oxymores ou de pléonasmes. C’est qu’en affaires ou en entreprise, la nouveauté doit s’adosser sur un usage, un marché, une application, un concept ou un procédé connus. Pas question de sauter à deux pieds dans l’aventure de l’invention pure, il faut pour bien innover cheminer de l’idée au marché en assurant ses prises. Voici des considérations sémantiques qui devraient limiter (ou inspirer) les productions éditoriales sur l’innovation qui s’interrogent sans fin sur la meilleure façon de «créer de la valeur». Les entreprises gagneraient peut-être à limiter leurs prétentions à « gérer l’inventivité » dans des « processus d’innovation » ennuyeux comme la pluie et la plupart du temps infertiles. Une vision plus saine et peut-être plus féconde consisterait sans doute à accepter de perdre de l’argent en permettant à des gens curieux et intelligents de s’amuser. Je vois déjà la tête du directeur de la recherche et développement de la World Company (qui sommeille en chacun de nous) à la lecture de ces lignes. C'est pas encore cette année que je vais me faire embaucher chez Machin, Inc. L’invention, c’est la création de quelque chose de nouveau. L’innovation, c’est l’invention qui rapporte des sous.

Innover : introduire dans quelque chose d’existant ou de connu un élément neuf, par opposition à conserver, copier, imiter. Comme la note précédente le fait remarquer (désolée pour l’insistance), la signification exacte du mot rend redondante l’expression « innover pour améliorer », puisque qu’une innovation est toujours un ajout, une amélioration, une façon de faire du neuf avec du vieux. Si innovation incrémentale est une redondance, innovation de rupture est un oxymore. Mais i faut reconnaître que ces emplois sont nécessaires pour distinguer ce qui se passe dans la production industrielle quand elle ne se vend plus, ou plus aussi bien, qu’elle risque de se banaliser, qu’elle doit se renouveler.

Intégral : complet. Ne pas confondre avec intègre et intégrant.

Intègre : qui ne se laisse pas altérer ni corrompre (au sens figuré), honnête.

Intégré : participe passé du verbe intégrer (en math, trouver l'intégrale d'une quantité différentielle, puis entrer dans une grande école, et par extension entrer ou faire entrer dans un ensemble). Intégrant : qui fait partie d’un ensemble.

Intégralité : désigne la qualité physique de ce qui est complet. J’ai lu votre rapport dans son intégralité.

Intégrité : qualité physique de ce qui est intact (ex. : intégrité corporelle d’une personne après un accident ou une agression) ; qualité morale de quelqu’un d’honnête et de probe et qui a le pouvoir de ne pas l’être tout à fait (homme politique, dirigeant, juge intègres).. Ne pas confondre avec intégralité (voir ce mot). On parlera de l’intégrité physique et morale d’un homme, mais on dira l’intégralité d'un texte (et jamais l’intégralité d'un honnête homme, à moins évidemment qu'il ait été question de le découper en morceau).

Intelligence économique : ici le mot intelligence est un anglicisme, d’ailleurs parfaitement intégré, emprunté au langage des services secrets pour désigner l’activité de renseignement.

Intelligence émotionnelle : souvent désigné par l’acronyme QE (quotient émotionnel), ce concept (où l’intelligence n’a rien à voir avec le renseignement ou la veille économique, ni avec l'intelligence tout court) vient d’un magma de trucs psychologiques et psychiatriques dans lequel l’entreprise (et ses consultants) tire aujourd’hui la majorité de ses nouveaux concepts, après avoir exploité la mine du jargon scientifique… Le QE définit les nouveaux canons de l’excellence organisationnelle, mais ne se définit pas pour autant. Autant dire qu’on met n’importe quoi dans ce concept, qui remplace celui de « charisme », vieillissant et écarté des prescriptions entourant la notion de leadership.

Intensif ou intense : dans intensif, il y a une idée d’effort volontaire qui manque à intense. Mais cette distinction se perd. On entend parler de circulation intensive et cela ne gêne pas grand monde (qui croit peut-être que la circulation fait exprès d’être dense, pour les embêter).

Interface : nom féminin. Au figuré, signifie à la fois le point de contact et le lieu de transit ; être à l’interface d’un client et d’un fournisseur, de l’entreprise et de l’école… être à l’interface d’un projet ( ?) ne veut rien dire de précis, mais peut suggérer qu’on se prend toutes les galères dudit projet…

Intergénérationnel : correct mais moche. Préférer si possible « génération » précédé de la préposition qui convient : les liens entre génération, un conflit de génération, la transmission entre générations, etc.

Interpeller : ici, pour une fois, ce n’est pas le langage de l’entreprise qui contamine, mais c’est lui qui est infecté par une tournure toute faite et prétentieuse très prisée dans les milieux psy. Préférer si possible : intéresser, retenir l’attention, faire rêver, mettre la puce à l’oreille. Cela m’interpelle quelque part : cela me rend perplexe, je ne sais pas quoi en dire, j’aimerais en savoir plus.

Intervenir : verbe intransitif. Ne pas mettre le verbe à toutes les sauces. S’utilise pour exprimer l’idée d’une action pour changer quelque chose, dans une discussion (le président est intervenu pour clore les débats), dans une manifestation publique (la gendarmerie est intervenue), dans un accident (les pompiers sont intervenus), dans une controverse (les artistes sont intervenus contre le projet de loi). Dans le dernier cas, intervenir prend l’idée de « prendre position ». Attention à ne pas utiliser le verbe pour «prendre la parole », « prononcer un discours », « donner un cours », etc. Attention aussi à ne pas dire d’un événement qu’il est intervenu, ce qui n’a pas beaucoup de sens ; dire plutôt qu’il s’est produit, qu’il est arrivé, qu’il est survenu.

Inventer : créer ou découvrir quelque chose de nouveau. On a inventé le téléphone, on a découvert la pénicilline (qui existait déjà dans la nature). Pour être parfaitement déconcertant et dégoûter les amateurs de logique, le français juridique parle de l’inventeur d’un trésor pour désigner celui qui a eu la chance de le découvrir.

Inventer : créer quelque chose de nouveau. Antonio Meucci a inventé le téléphone, Fleming a découvert la pénicilline (qui existait déjà dans la nature).

Invention : voir innovation.

Inventeur : qui crée ou qui découvre quelque chose de nouveau. Pour être parfaitement déconcertant et dégoûter les amateurs de logique, le français juridique parle de l’inventeur d’un trésor pour désigner celui qui a eu la chance de le découvrir (alors que le verbe ne signifie que créer quelque chose de nouveau).

Inversement : sans accent sur le deuxième e.

Investigation : enquête, sondage, étude. Attention, « investiguer » n’existe pas, sauf dans le franglais. Dire examiner, étudier, sonder (un problème), ou faire une enquête (sur un accident, un délit ou un crime).

Investir : un petit problème avec l’utilisation militaire ou militante de ce verbe, qui ne signifie pas envahir ou occuper, mais seulement encercler, cerner, assiéger.

Invoquer : attention à ne pas confondre avec évoquer, surtout que les deux termes sont synonymes dans le sens d’appeler, de faire apparaître par la magie (invoquer les esprits). Mais invoquer signifie 1. appeler par la prière 2. faire appel, avoir recours à – invoquer une loi, un témoignage, un précédent, un argument à l’appui d’une thèse.

Juste-à-temps : nom masculin, noter les traits d’union. Pas de trait d'union si l'expression est utilisée comme adverbe.

Killer app : « C’est quoi ton killer app ? » Si vous ne savez pas répondre à cette question, autant dire que vous êtes fichu. Comment ? Vous ne savez pas que c’est cela qui fait toute la différence ? Vous en êtes toujours à votre facteur clé de succès pour définir votre différenciation ? Pauvre pomme. Killer app vient de killer application, ce qui fait qu’un équipement informatique soft ou hard est in ou out. Par extention, le killer app fait que vous résistez ou non à la concurrence. On est krétin ou on ne l’est pas.

Knickerbockers : un euro à celui qui parvient à placer ce mot dans une présentation Powerpoint.

Knowledge management : encore un exemple de vie et mort d’un concept qui rappelle qu’en management, il ne faut surtout pas s’attacher. Les concepts ont une durée de vie beaucoup plus courte que vous, et de la même façon que ceux qui aiment les chiens vivent avec le deuil de tant de bêtes chéries et mortes de vieillesse, les managers sensibles risquent de pleurer beaucoup pendant leur vie. Il y a quelques années à peine, ce concept à la fois réducteur et totalitaire était censé tout régler dans l’entreprise, à court, long et moyen terme. Et bien bonne chance pour le définir maintenant qu’il est desséché, enterré et remplacé. En management, il n’y a pas que les modes qui ont la vie courte. Des 5000 plus grandes entreprises en exercice aux États-Unis en 1982, seulement 35 % subsistent (comme entité indépendante) à peine 15 ans plus tard (source : Critical Mass, Philip Ball, Arrow Books, 2005).

Krach : cette graphie (avec un k) s’impose pour parler d’une débâcle des cours de la Bourse. Pour l’écrasement au sol d’un avion, ou pour le plantage du disque dur, on utilise « crash ».

12 janvier 2006 dans I | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Langue de bois : planches de salut. Il y a deux sortes de causes : les causes perdues, et les causes toutes trouvées. Comme leur nom l’indique, les causes perdues égarent souvent ceux qui les enfourchent. En revanche, les causes trouvées mènent loin ceux qui s’en emparent : s’indigner contre l’inégalité, vitupérer contre la pauvreté, s’insurger contre la souffrance, cela donne une contenance, des points pour la carrière, et un label de qualité humaine fort apprécié aujourd’hui. Parmi les causes trouvées, je me demande s’il ne faut pas ranger la dénonciation de la langue de bois. En finir avec les discours tout faits de l’idéologie, qu’elle soit politique, patronale ou syndicale, la volonté est générale. Au feu les formules stéréotypées, les évidences pompeuses, les affirmations qui n’engagent personne, en tous cas pas celui qui les énonce. Faussement savante, empestant l’idéologie, acculée au faux fuyant, la langue de bois fait l’unanimité contre elle : ceux qui l’emploie sentent combien elle les décrédibilise ; ceux qui l’écoutent se désolent du sentiment d’être pris pour des poires. Il faut vraiment être naïf ou cynique pour y croire ou faire semblant. La bonne publicité d’ailleurs fuit la langue de bois comme la peste, preuve de l’habilité des agences de communication. Le management n’a pas ce bon sens, et donne tous les jours des raisons de s’indigner, ou de rigoler, à la machine à café. La question n’est pas « qui aime la langue de bois ? ». Mais « qui peut s’en passer ? ». Et comment ? Tout le monde n’est pas Winston Churchill en 1940 qui promettait à ses compatriotes du « sang, de la sueur et des larmes ». Ni cette dame qui prétendait appeler un chat une sale bête. Dans l’incapacité de répondre à ces deux questions, voici quelques remarques sur les difficultés du discours à nouer pensée, réalité et position hiérarchique. Quitte à glisser dans la défense de la langue de bois, et à m’égarer dans une nouvelle cause perdue…

1. La langue de bois est un bon indicateur d’enlisement de la pensée : dans les sables mouvants de la contradiction, de l’imprécision, de l’incohérence et de l’inconsistance, au lieu de se mettre à bafouiller, à bégayer, ou de se taire tout simplement, le « décideur » qui forcément ne pense pas TOUT ce qu’il dit, s’accroche à la langue de bois comme à une planche et se sort du mauvais pas. Phrases toutes faites, euphémismes qui ne fâchent personne, lieux communs qui n’engagent pas nous indiquent ainsi clairement l’absence de pensée critique et nous signalent que nous pouvons décrocher notre attention ou mettre en difficulté notre interlocuteur (ce que curieusement, nous faisons rarement).

2. Notre capacité à TOUS de nier la réalité est une des racines les plus inextirpables de la langue de bois. Celle-ci n’est pas le fait seulement de celui qui la prononce, mais également de celui qui l’écoute. Or les faits sont beaucoup plus souvent contestés que les affirmations péremptoires. La langue devient de bois quand elle se déverse dans une oreille dure comme l’ébène.

3. Brouillard des signification, brume des interprétations, confusion, et tentation de laisser tout dans l‘indifférenciation : le langage est la possibilité du mensonge. La réalité nous ramène à la table du jeu, sauf quand l’idéologie s’en mêle. Alors tout devient affaire de discours. L’idéologie parle la même langue, quels que soient l’endroit et l’époque où on la parle : déni de la réalité, sornettes et compagnie. Encore une fois, la langue de bois nous sert de panneau indicateur. Pas pour nous mener à la vérité, mais pour nous prévenir du danger…

4. L’agacement que provoque la langue de bois est la réaction allergique de notre esprit face à l’idéologie. Personne n’est vraiment à l’abri de la langue de bois, mais personne n’en est vraiment la dupe. Le problème, c’est qu’en même temps qu’elle nous immunise contre l’idéologie, elle nous contamine : on parle difficilement une autre langue une fois qu’on l’a entendue.

5. La langue de bois est une langue de petit chef. Les grands commandants l’utilisent rarement, sauf évidemment quand ils parlent idéologie. Mails malheur aux petits : hors la langue de bois, point de salut. Toute utilisation de la langue commune dans l’exercice de leur autorité leur sera éternellement reprochée (cf. racaille, karcher, etc.).

Largesse : au pluriel, les largesses faites par quelqu’un sont les dons généreux qu’il fait de ses richesses (ou de celles des autres). Au singulier, le mot désigne la générosité et la munificence, ou la disposition à être généreux. Attention à la confusion avec largeur.

Largeur : faire des largeurs, c’est nager dans le sens du petit côté de la piscine (au lieu de faire des longueurs). Rien à voir donc avec faire des largesses. Au figuré, la largeur (et évidemment pas la largesse) est le contraire de l’étroitesse (d’esprit ou de vue).

Leadership : fonction, position de leader, et par extension, position dominante. Le leadership d’un parti, d’une entreprise, d’un pays. Renforcer, perdre son leadership.

Alors qu’aujourd’hui, toute affirmation d’autorité est automatiquement dénoncée et ridiculisée, la notion même de leadership semble aller de soi. Personne ne la remet jamais en cause, mais on se donne rarement la peine d'en définir le terme.

Pourquoi les tentatives de traduction échouent-elles en français ? C’est que le leadership est un vrai concept, contrairement à des termes tels team ou task force qui ont leur équivalent en bon vieux français. Mais quels sont les contours de ce concept ?

Un leader est quelqu’un qui a la capacité de se faire écouter, d’imposer son point de vue, de mobiliser ceux qui l’entourent. Dans les grandes figures politiques du leadership, on trouve des personnalité comme Gandhi, mais aussi des gens très peu recommandables comme Hitler. Il s’agit d’une qualité éminemment personnelle : contrairement à l’autorité, elle n’est pas attachée à la fonction, mais bien à une personne.

La sociologie française, qui étudie tous les rapports humains sous l’angle de la domination, a contaminé les autres sciences humaines, à commencer par le management. Or il faut penser le leadership autrement qu'en termes de rapport dominant-dominé : quelqu’un en position de force n’est pas nécessairement un leader. Un leader n’est pas forcément quelqu’un au faîte du pouvoir. Certes, un leader déchu (ils finissent souvent mal) a perdu tout pouvoir, donc le leadership est certainement attaché au statut, à l’influence ou à la prise de pouvoir. Mais pas seulement, ni simplement.

Le leadership est aussi une affaire de séduction, de « charisme », comme on disait encore il y a quelques années. Sur ce point, il s’oppose à l’autorité.

Le leadership est à double-tranchant : certes il permet à une entreprise de bouger, mais il complique son organisation. On préfèrerait sans doute que le pouvoir s’exerce dans les limites bien définies d’un appareil, où les fonctions priment sur les personnes. Mais le leadership bouscule tout cela. Tant pis s’il s’exerce dans de mauvaises mains. L’autorité peut également tomber sur des gens mal intentionnés. Mais l’autorité ne dépend pas directement des qualités de celui qui la détient, elle lui a été décernée par d’autres, et elle exige des titres, des fonctions. Le leadership s'en passe. Personne n'écrit "leader" sur sa carte de visite, ou sur sa porte.

Un grand débat dure : le leadership est-il inné ou s’acquiert-il comme n’importe quelle autre compétence professionnelle ? Les consultants vous assurent qu’il s’acquiert et se proposent d’ailleurs de vous le vendre. Les leaders eux-mêmes sont partagés : il s’agit pour eux d’une qualité qu’ils ne peuvent pas définir, mais qui se travaille, et dont ils peuvent dénombrer les exigences : courage, énergie, patience, ténacité, communication et travail de tous les instants afin de convaincre, pousser, passionner… Pour l’aider dans ce travail, le leader peut très utilement s’entourer de conseillers. Mais en définitive le leader est tout seul.

Lister : beaucoup plus court et plus pratique que « établir une liste de ». Emploi critiqué, mais qui finira sans doute par s’imposer. En attendant, on peut aussi utiliser dénombrer, recenser, inventorier…

Loyal : (voir fidèle) en amour comme en affaires, laissez la loyauté aux Anglais et soyez fidèles si cela vous plaît.

12 janvier 2006 dans L | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Maître d’œuvre – maître d’ouvrage : le ou la maître d’œuvre, c’est la personne physique ou morale qui dirige un chantier, dans la construction (et au figuré dans la recherche), pour le compte d’un maître d’ouvrage avec qui le marché a été conclu et les travaux ont été définis.

En anglais, la maîtrise d'oeuvre se traduit tout simplement par "project management". Et l'assistance à la maîtrise d'ouvrage se dit "project ownership assistance".

Managing director : se traduit par membre du conseil d’administration (attention, Outre-Manche, ce titre recouvre un rôle plus opérationnel qu’en France).

Managing officer : selon le contexte, se traduit en français par cadre dirigeant, ou directeur général (bien que le titre de Chief Executive Officer soit plus courant).

Maintenance : les puristes préfèrent parler de service d’entretien, mais perdent ainsi le sens d’après-vente que ce terme importé de l’anglais. La maintenance est plus proche de l’après-vente que l’entretien.

Majuscule : ne pas se laisser contaminer par l’anglais en mettant des majuscules partout. Cela fait plouc et puis ce n’est pas la majuscule qui ennoblit le titre, la fonction, le qualificatif... Voir d’ailleurs les règles plus bas pour monsieur et madame. Voir également l’entrée président-directeur général et sigles.

Rapple d'une règle élémentaire de plus en plus ignorée : les adjectifs en français ne prennent presque jamais de majuscule, sauf lorsqu'ils se placent avant le mot en majuscule qu'ils qualifient. Ainsi on écrit la Seconde Guerre mondiale. En revanche, il faut écrire : l'Union monétaire européenne, la République française, etc.

Maximale,-ale, aux : adjectif, signifie qui est au plus haut degré.

Maximum : nom masculin ; ne pas utiliser maximum comme adjectif. Nous avons fait le maximum. Nous avons atteint notre rentabilité maximale. Minimum et minimal suivent la même distinction.


Médire
: en parlant de quelqu’un ou d’une institution, dire du mal qui est vrai ou que l’on présume vrai. Calomnier : dire du mal qui est faux ou que l’on sait faux. À ce propos, j’ai été étonnée d’entendre un prêtre catholique romain commenter cette distinction. Assez âgé puisqu’il a fait son séminaire juste après la Seconde Guerre mondiale, on lui a enseigné, et même en insistant beaucoup sur ce point, que la médisance est bien plus grave que la calomnie. Mentir en racontant que votre collègue joue au solitaire ou se masturbe devant son écran, c'est moins grave que révéler qu'il couche avec la comptable, justement parce que c’est vrai. L’un et l’autre ne regarde personne, mais la vérité rajoute une couche d’indignité à la malveillance. De plus, on ne peut pas réparer une médisance, tandis que la calomnie est (en partie) réversible. À méditer.

Merci : au masculin, formule de remerciement ou de politesse. Au féminin, le mot signifie pitié, grâce, danger. Parfois j’imagine ce que serait un monde où les genres seraient confondus. … C’était la petite minute de cauchemar sémantique.

Merci de ou merci pour ? Cela dépend de ce qui suit. S’il s’agit de quelque chose de concret, on utilise pour : merci pour le chocolat. Mais s’il s’agit d’une action ou de quelque chose d’abstrait, on utilise le de : merci de votre attention, merci d’avoir patienté. Merci pour votre lettre ou de votre lettre (nuance : dans le deuxième merci, on salue le contenu ou l'intention de la missive). Merci du compliment est subtilement ironique. 

Mésaventure : voir avatar.

Méthode : ensemble de moyens raisonnés suivis pour arriver à un but (démontrer la vérité, accomplir une tâche, etc.). Plus spécialement, et souvent au pluriel, procédé technique ou scientifique comme les méthodes thérapeutiques, méthodes d’expérimentation, méthodes de vente, etc.

Méthodologie : étude des méthodes scientifiques et techniques. On utilise abusivement le terme à la place de méthode et même de technique, en voulant parler de manière de procéder.

Milieu : le milieu est toujours ambiant. Inutile donc de le préciser.

Modérateur : pour l’anecdote, je suis tombée par hasard sur ce mot bien français, certes, mais dont l’utilisation vient très certainement de l’anglais pour désigner celui qui anime un forum sur Internet et une table ronde dans les petits déjeuners marketing et les conférences de presse. Et bien ce titre qualifie dans l’Eglise presbytérienne le responsable d’une assemblée ou d’un synode.

Monétariser, monétarisation : voir les entrées suivantes.

Monétisation : on entend parler de la "monétisation des RTT". En français, cela veut dire le paiement par l'entreprise des heures que le salarié, sous le régime de la réduction de temps de travail à 35 heures par semaine, est censé récupérer en prenant du temps libre. L'entreprise lui "rachète" ces heures au tarif horaire, lorsque cela l'arrange bien entendu, et que le salarié accepte cet arrangement.

Monétiser : voir monnayer deux entrées plus loin.

Mondial : et tous les termes qui en sont dérivés sont de vieilles expressions employées couramment depuis le conflit de 1914 - 1918. Aujourd’hui, mondialiser et globaliser s’emploient indifféremment. Durant les guerres européennes qui ont déchiré les XVIIe et XVIIIe siècles, on parlait de guerres universelles car toutes les puissances connues du moment y étaient mêlées. Aujourd’hui, la concurrence n’est « que » mondiale. Pffuit. Le terme mondial (ou mondialisé, ou global) semble évincer l’adjectif multinational, qu’on ne rencontre presque plus. En politique comme en économie, le terme qualifie tout simplement une activité ou une entité qui concernent plusieurs pays (force d’intervention multinationale, entreprise multinationale). Mondialisé ou global ont l’air d’en dire plus, mais on ne sait pas précisément quoi.

Monnayer : signifie transformer en monnaie (monnayer un lingot), ou convertir en argent liquide (monnayer un bien) ou encore se faire payer (un bien tangible ou intangible) : monnayer ses services, ses talents. Entendu à la radio un pauvre dirigeant emberlifocoté dans un hypothétique « monétiser » ( ?) et tiré d’affaire par un journaliste sardonique: « dites monnayer, ce sera plus simple ». Le lendemain, sur la même radio, une responsable politique, qui s'est corrigée toute seule. Je me suis demandé d’où pouvait bien venir ce monétiser. En tous cas, pas de l’anglais. Il est vrai qu’on ne prête qu’aux riches… En fait, cela vient de démonétiser, qui signifie retirer une monnaie de la circulation et par métaphore, discréditer quelque chose ou quelqu'un. L'emploi de monétiser, qui signifie "changer (du métal) en monnaie" en langage économique, semble remplacer monnayer, s'il faut en croire Google. Cela me rappelle un cours d’économie il y a très longtemps, sur la loi de la « mauvaise monnaie qui chasse la bonne ». Entre deux termes, on choisit toujours le plus moche. J’ai entendu également « monétariser », barbarisme sans excuse, sinon l’ignorance du mot monnayer.

Montrer : voir démontrer.

Monsieur, madame : utiliser l’abréviation le plus souvent possible. Monsieur le Directeur ou Chère Madame (en toutes lettres et avec majuscule à Monsieur et à Madame) s’utilisent quand on s’adresse au monsieur ou à la dame en question, dans une lettre ou dans la transcription d’un discours direct. Sinon, dans le corp du texte, on écrira M. le directeur (noter l'absence de majuscule à directeur), M. François Ponge, MM. Martin et Delane, ou Mme Simon, etc. Noter les abréviations correctes : M. et jamais « Mr » ou « Mr. » ; Mme et pas « MMe ». Le titre de mademoiselle (Mlle) existe encore pour désigner une femme non mariée, mais est de moins en moins employé dans le monde professionnel. Messieurs s"abrègent en MM., mesdames en Mmes. Dans les présentations power point, ou dans les rapports, faut-il faire précéder de M. ou Mme tous les patronymes ? C'est une question assez délicate, et même épineuse, car la civilité n'est pas toujours là on l'attend. Le M. ou Mme de courtoisie doit être manié avec prudence. Certains se vexent de voir leur nom précédé du titre parce qu'ils y sentent une allusion à leur âge... Dans certaines listes, les hommes ont leur prénom, les dames leur nom précédé de Mme, et elles y voient le commencement d'une forme subtile de discrimination... Le plus simple (et par là le plus élégant) est de mettre le prénom puis le patronyme (JAMAIS le prénom après le nom, cela fait fiche de police), éventuellement suivi (et pas précédé !) du titre ou de la fonction. La règle de la courtoisie qui s'impose est le respect scrupuleux de l'orthographe des noms et de l'exactitude des titres.

Majuscule ou minuscule à monsieur ou madame ? On réserve la majuscule à l’adresse ou discours direct. Mais, tout naturellement, quand les mots sont des noms communs, on écrit : "Un monsieur est venu . Les petites filles jouaient à la madame. ". On mettra cependant une majuscule dans les phrases suivantes : Le majordome annonça que Madame était servie. Le chef de rayon s’approcha de Babar et lui demanda ce que Monsieur l’Eléphant désirait.

Multimédia : en un mot, accent sur le e de média. Adjectif ou nom : le multimédia a révolutionné l'industrie de la culture ; la publicité lance des campagnes multimédias.

Multiplier : voir démultiplier.

Morale : voir éthique.

Mots courts : entre deux mots, il faut choisir le moindre, disait Valéry. Pour l’élégance, qui en écriture est synonyme d’efficacité, rien ne vaut la simplicité et la concision. Parfois, il s’agit aussi de faire rentrer un texte dans une case sur une planche de présentation Power Point … chaque caractère compte. Alors :

PLUTÔT QUE ... ÉCRIVEZ

Abondamment ... beaucoup

Acquisition ... achat

Approximativement ... environ, presque, près de

Auditoire ... public

Correspondance ... courrier

Émettre le vœu ... désirer, souhaiter

Être en mesure de ... pouvoir

Évidemment ... bien sûr

Émoluments ... salaire

Excessivement ... trop (souvent, « très » suffit)

Investigation ... enquête

Largement ... beaucoup

Rédiger ... écrire

Rapidement ... vite

Mutualiser : ce mot fait partie de la panoplie du parfait manager. Se dit pour répartir, partager à égalité un risque, des frais entre les membres d’un groupe. Se dit également pour mettre en commun, échanger, comme « mutualiser des compétences ».

Thérèse Sepulchre

12 janvier 2006 dans M | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Au niveau de : emploi critiqué pour en ce qui concerne, du point de vue de, dans le domaine de, en matière de, dans, en termes de, à l’échelon de … On utilise au niveau de sans danger de se faire taper sur les doigts par les puristes, par exemple : on m’a donné une tâche au niveau de mes compétences. Et encore, allez savoir. (à la portée de, au diapason).

Nommer ou promouvoir quelqu’un à un poste ? nommer, c’est désigner quelqu’un pour occuper une fonction. Promouvoir, c’est l’élever à un poste plus prestigieux, avec plus de responsabilité.

Notable ou notoire ? notable, c’est ce qui est digne d’être noté, ce qui est remarquable. Notoire se dit de ce qui est connu de tout le monde.

12 janvier 2006 dans N | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Obéissance : il y a quelques années, je donnais une formation à des cadres chinois sur la communication managériale, afin de les aider dans leurs relations avec leur maison mère, un groupe britannique. Je m’étais échinée pendant une semaine, les participants avaient été très attentifs et patients, mais à la fin, l’un d’eux me fit gentiment remarquer : « c’est très intéressant ce que vous nous racontez, nous avons beaucoup appris sur les Européens ; mais en Chine, manager une équipe, c’est se faire obéir ».

Obérer : verbe transitif direct, signifie charger de dettes. La guerre obère le pays, pas la peine de préciser de dette. Sa famille s’est obérée pour lui. Le verbe est parfois utilisé comme synonyme de « nuire à, compromettre », comme dans l’exemple du Petit Robert tiré du Monde : La confusion entre recherche et développement finit par obérer l’une et l’autre.

Observance ou observation : on observe des règles ou des prescriptions médicales, mais on parlera de l’observance des règles dans un monastère, de l’observance du jeûne ou du Ramadan, de l’observation d’un régime, de l’observation du règlement.

Obvier à : signifie prendre des précautions pour parer à une éventualité fâcheuse. Ne pas oublier le à ou alors recourir à un synonyme moins soutenu, moins littéraire, comme éviter, prévenir, remédier. Obvier à est correct, mais quand même, cela sonne un peu prétentieux.

On : tous les manuels de savoir – écrire, et même les guides du bien – parler, bannissent ce petit pronom indéfini du langage châtié. C’est très dommage, d’autant que son absence oblige à des contorsions et des lourdeurs pires que la prétendue inconsistance du pronom. Pour bien l’utiliser, voici quelques rappels et conseils piqués à Joseph Hanse, dans son Dictionnaire des difficultés du français moderne, Duculot, 1983.

1. On se substitue à un pronom personnel pour exprimer une mise à distance ou un sentiment tiré d’une gamme très variée : modestie, orgueil, tendresse, ironie, mépris… (On a voulu tenter, écrit un auteur dans sa préface, pour ne pas dire « je ». Alors, petite fille, on est contente ? Doit-on comprendre la volonté de la direction d’arrêter la négociation ? (le on sonne ici un peu comme une menace). On se substitue très souvent à nous, mais aussi à elle, à tu, vous, etc. L’accord de l’adjectif peut se faire avec la personne sous-entendue dans le on : on n’est pas toujours jeune et belle ; on n’est pas des esclaves ; on n’est pas plus discrète.

2. Le verbe reste toujours au singulier, mais le participe passé, comme l’adjectif, s’accorde généralement avec ce que représente le « on ». « Et, s’étant salués, on se tourna le dos » (G. Flaubert, Madame Bovary, II). Mais on peut parfaitement laisser le flou et accorder avec le pronom indéfini (donc masculin singulier).

3. Quel pronom personnel pour renvoyer à on ? Si possible, on emploie soi ou se : On aime dans les autres ce qu’on retrouve en soi. Sinon, on utilise vous ou nous : on n’aime guère les gens qui nous font du mal. Même principe pour l’adjectif possessif : on reconnaît facilement les siens.

4. On se répète plus souvent que les pronoms personnels devant un verbe juxtaposé ou coordonné avec un autre ayant le même sujet : on s’inquiète et on se pose des questions (au lieu de il s’inquiète et se pose des questions).

5. L’on peut s’employer au lieu de on en tête ou dans le corps de la phrase, par souci d’euphonie ; c’est dans la langue écrite qu’il apparaît surtout, sans jamais s’imposer. On le trouve particulièrement après ou, et, où. On l’évite après dont ou devant un mot commençant par l : les enfants dont on parle. Si on le veut. Et on le lui a donné.

Opérationnel : nous vient à la fois de la langue anglaise et du langage militaire (deux sources majeures du management).

De l’anglais operations, operational : qui peut fonctionner, être mis en service (en parlant d’un site, d’une usine, d’un hôpital). Capable d’agir (en parlant par exemple d’un salarié qui devient rapidement opérationnel). Une unité opérationnelle peut aussi être une unité en activité ou en exploitation, un service qui fonctionne correctement, etc. Un deuxième sens de l’anglais « operational » est beaucoup plus technique. Operational research est la recherche opérationnelle, une discipline faisant appel à l’analyse mathématique pour étudier les organisations et optimiser les résultats.

Du militaire opérations, relatif aux mouvements militaires, aux combats, au terrain, par opposition à stratégique.

Optimum : pas besoin de montrer qu’on a fait ses classiques en parlant d’optima au pluriel. Des optimums se disent et s’écrivent encore mieux. On évite l’emploi du mot comme adjectif au profit d’optimal, optimale, optimaux.

Option : ne pas trop abuser de ce mot juridique ou commercial et préférer les choix aux grandes options.

Optionnel : deux n. Les choix optionnels n’existent que dans les délires des commerciaux.

Opportunité : d’une décision, d’un événement. Emploi critiqué (mais compris par tout le monde) au sens de circonstance opportune. Utiliser possibilité, occasion, chance. La confusion vient de l’anglais opportunity qui signifie occasion. Alors on met de l’opportunité partout, et parfois ce n’est pas très opportun. Notre opportunité (qui signifie le fait de convenir à un cas déterminé, d’être adapté aux circonstances, de venir à propos) se traduit en anglais par "appropriateness".

Opportuniste est toujours péjoratif quand on parle de quelqu’un qui fait passer ses intérêts à court terme avant ses principes. Mais un choix opportuniste peut être une décision judicieuse, prise au bon moment, en fonction des circonstances et des intérêts en jeu, au prix parfois de quelques compromis.

Oppresser : se dit en parlant de la respiration et de ce qui la gêne ; Opprimer se dit de ce qui est soumis à un pouvoir injuste et violent. Mais l’oppression est le substantif d’opprimer, et oppresseur (toujours au masculin quand c'est un nom) se dit de celui qui opprime. L'ajectif oppresseur, oppressive existe aussi. Un régime peut être oppresseur, mais on dit plutôt répressif, et une loi peut être oppressive, mais on dit aussi répressive.

Opprobre : nom masculin (l’opprobre public), noter les deux p et ne pas prononcer ‘eau probe » ou « eau propre », sauf si on s’appelle Bobby Lapointe et que l’on chante les malheurs d’une fille tombée dans « l’opprobre du ruisseau ».

Or : n’est suivi obligatoirement d’une virgule que devant un complément. Exemple : or, un jour, il arriva que…

Ordonnancer, ordonnancement : ne JAMAIS employer ces termes tirés de la langue juridique et comptable à la place de mettre en ordre (mise en ordre), agencer (agencement), disposer (disposition), organiser (organisation), planifier (plan), etc. Ordonnancer signifie d’après le Petit Robert « autoriser le paiement d’une dépense publique après vérification de l’engagement ».

Original : authentique ; inédit (une édition originale) ; singulier ; personnel.

Originel : initial, qui appartient au commencement (le sens originel d’un mot).

Originer ; "Freud origine l’hystérie dans le refoulement d’un trauma … " Pouah ! Pourquoi pas, même si c’est plus long : "Freud place l’origine de l’hystérie dans le refoulement ..." ?

12 janvier 2006 dans O | Lien permanent | Commentaires (1) | TrackBack (0)

Package : un bouquet de services, un ensemble, un forfait, un train de mesures … Attention, le mot s’utilise également en informatique.

Compensation package : un progiciel de gestion des rémunérations ou une enveloppe salariale ?

Packagé : « offre packagée » est une expression fade et triste. Elle me fait irrésistiblement penser à des packs de bières qu’on aligne sur une tablette devant la télévision, avec une pizza grasse et tiède, et que l’on enfile cannette après cannette sur un canapé pelucheux et plein de miettes pendant qu’un présentateur de variétés s’échine à être drôle. Bref tout un programme…

Pair – paire : aller de pair = ensemble, sur le même rang, dans la même direction. Ne pas confondre avec aller par paire = aller par deux.

Pallier : ce verbe est transitif, il ne faut donc surtout pas dire ou écrire «pallier à », même dans le sens de « remédier à ». Le vrai sens de pallier, est dissimuler, atténuer comme pallier un inconvénient, une défaillance. Ne pas confondre non plus avec le verbe parer, intransitif, dont la signification est proche (se protéger, faire face, s’occuper : parer à un inconvénient).

Parti – partie : attention, prendre parti pour, tirer parti de. Mais prendre à partie, avoir partie liée. Voir plus loin à prendre.

Partial – partiel : partial signifie "qui dénote un parti pris pour quelqu’un ou pour des idées, sans souci d’objectivité, de justice ou de vérité" ; partiel signifie qui ne concerne qu’une partie. Une vue partiale d’un problème est forcément partielle, mais le contraire n’est pas vrai.

Participe passé (accord): il n’est pas question de donner ici un cours sur ces accords torturés et torturants (rappelez-vous des verbes pronominaux non réfléchis et autres chinoiseries) ; mais si vous en avez l’occasion et le prétexte, par exemple un enfant en CM2, donc assez grand pour se farcir les règles de l’accord du participe passé, offrez-vous la série des Secrets de grammaire de la fée Nina, publiée par les Dictionnaires Robert. Amusement et éclaircissement garantis.

Par contre : il paraît que cela n’est pas joli, pas français, pas comme il faut, et qu’il faut le remplacer par « en revanche » ou « au contraire ». Par contre est pourtant tout à fait correct, j’aime mieux cela car j’en mets partout. Pardon si cela n’est pas joli.

Pécuniaire : adjectif, qui a rapport à l’argent ou qui contient de l’argent. Des aides pécuniaires, des préoccupations pécuniaires. Pécunier n’existe pas. Donc les soucis, comme les préoccupations, sont pécuniaires.

Pêle-mêle : adverbe ou nom masculin toujours invariable. Des notions présentées pêle-mêle, de vieux pêle-mêle de photos sur un mur.

Performer : entendu par Thierry do Espirito, et par d’autres ; heureusement, personne n’a encore parlé devant moi de la manière dont son entreprise performait… Mais il paraît que cela se dit, que cela s’entend, que cela se répète … Il faut évidemment en finir immédiatement avec ce barbarisme. Pourquoi est-il apparu ? sans doute pour pallier l’absence, en français, d’un verbe intransitif signifiant à la fois l’activité et le résultat de cette activité. Le verbe « perform » en l’anglais est tentant : il mélange subtilement l’idée de jouer une partition ou un rôle avec celle d’obtenir d’excellents résultats. On aimerait que les entreprises mélangent ainsi poésie et performances.

Performance en linguistique s’oppose à compétence ; cette distinction est reprise par les managers. Qu’importe le sabir, pourvu qu’il soit utile... et dans ce cas, l’emprunt à la linguistique est créatif, si j’en crois les multiples études sur les compétences qui ont permis à des entreprises d’améliorer leur avantage comparatif. On ne prête qu’aux riches…

Permanent : qui dure sans interruption pendant un certain temps. Ne pas confondre avec durable (qui peut durer, qui est susceptible de durer, qui dure effectivement). Une gêne ou une joie peuvent être durables ou permanentes, cela ne signifie pas la même chose. Depuis peu, le développement est durable ou n’est pas. Est-il permanent pour autant ?

Pétrolier : relatif au pétrole. Industrie pétrolière, profits pétroliers, pays pétroliers, guerre pétrolière.

Pétrolifère : qui contient du pétrole. Gisements, terrains pétrolifères.

Perpétuer : faire durer longtemps, maintenir, prolonger. Pour ne pas perpétuer un crime, commencer par ne pas confondre le verbe avec perpétrer.

Perpétrer : commettre.

Perspectives : pensez à les varier, en utilisant aussi les expressions comme angle, côté, point de vue, éclairage, optique, etc.

Phrases courtes : moins que la longueur des phrases, c’est l’uniformité de la construction qui lasse dans un texte. Utilisez des phrases courtes, oui, mais attention à ne pas ennuyer. Il faut alterner des phrases de toutes sortes de longueur et de construction. Mais en cas de doute ou manque d’expérience, ce sont bien sûr les phrases courtes qui s’imposent, car elles sont beaucoup plus faciles à écrire, donc moins risquées. Veillez aussi à alterner des paragraphes courts et longs. Avec un peu de pratique, on sait juger du premier coup d’œil si son texte va être fastidieux à lire, donc inefficace, rien qu’à voir la longueur des paragraphes. Si on a une succession de clones présentant chacun le même nombre de lignes, on a de bonnes chances d’endormir le lecteur.

Photo : des appareils photo (comme jeux vidéo).

De plain-pied : trait d’union. Ne pas écrire de plein-pied. De plain-pied signifie au même niveau que et au figuré, sans obstacle (ils sont entrés de plain-pied dans le secteur) et sur un plan d’égalité (nous avons négocié de plain-pied avec les patrons).

Dire aussi tapis plain. Plain, plaine vient du latin planum et signifie plat, uni.<

Sur le plan : on dit sur le plan moral, sur le plan des principes, sur tous les plans, c’est plus joli que « au niveau de ». Au plan de est critiqué.

Plein : un plein-temps (n.m.) ou travailler à plein temps (pas de trait d’union) ou à temps plein.

Poncif : thème ou expression dénué d’originalité. Banalité, lieu commun, stéréotype. Meuble une conversation médiocre : les saisons ne sont plus ce qu’elles étaient ; les jeunes ne respectent plus rien. Ne pas confondre poncif avec cliché et idée reçue. Les clichés sont des métaphores mortes : « remettre l’église au milieu du village » « la balle est dans leur camp », « attraper la balle au bond ». Ils sont bienvenus, attention allegro ma non troppo, dans la discussion et, avec encore plus de précaution, dans l’écriture, comme la maïzena ou la fécule de pomme de terre pour épaissir rapidement une sauce trop liquide ou pour lui donner le liant que n’a pas pu lui communiquer la cuisson. Les journalistes en font un usage maîtrisé qui dope des articles un peu secs ou abstraits (je ne parle pas des journalistes sportifs qui ne semblent pas savoir comment annoncer le tiercé ou les résultats du foot sans enfiler des métaphores usées jusqu’à la corde : fenêtre de tir, balle dans le camp du voisin, réponse du berger à la bergère, copie à revoir ou à rendre, etc.). Mais je pense aux clichés qui émaillent et colorent des textes un peu tristounets, comme le mélancolique « ramasser les feuilles à la pelle » ou l'énigmatique « je te tiens par la barbichette », ou la recommandation solennelle et incongrue « de ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain ».

Quant aux idées reçues, elles sont inévitables, il faut seulement veiller à ne pas les empiler. Déceler des idées reçues dans un raisonnement ou dans la présentation d’un problème peut être une façon intéressante de faire avancer la discussion, (à condition de ne pas prendre un air de pitié pour celui qui a proféré ladite idée reçue).

Mais tolérance zéro pour les poncifs ! Corrélat obligé du poncif : le stéréotype (l’enfer des banlieues, les clients pris en otage, l’autisme des directions générales ou des syndicats selon le côté de la tartine où l’on se trouve, la moustache des Anglais, le mercantilisme des Chinois, la rougeur des indicateurs, le coût et la gestion du stress, etc.). Le summum du poncif managérial : la complexification de la concurrence dans un monde mondial qui change de plus en plus vite.<

Le poncif, c’est comme le trou dans l’emmenthal du discours managérial : plus il y a d’emmenthal, plus il a de trous. Mais plus il y a de trous, moins il y a d’emmenthal.

Ponctuation : petit abrégé en préparation. N’hésitez pas à râler et à me le faire savoir pour m’encourager à le terminer. En attendant, vous pouvez consulter La Ponctuation ou l’art d’accommoder les textes, de Olivier Houdart et Sylvie Prioul.

Pose : ne pas écrire ce mot pour pause (temps d’arrêt pour le repos). Ben, oui, la faute est courante, et le correcteur de Word ne la décèle pas.

Postérieur : voir ultérieur et ne pas confondre avec précédent.

Posture épistémologique des consultants et des chercheurs en gestion ou Comment peut-on être Baruya ?

Les Baruyas, constatait l’anthropologue Maurice Godelier, se sont adaptés à la modernité avec une célérité extraordinaire. Société « primitive » qui n’avait jamais rencontré de « Blancs » jusqu’aux années cinquante, deux générations à peine leur ont suffi pour monnayer le moindre récit, la plus petite amulette, l’information la plus insignifiante, aux ethnologues et anthropologues chargés de les étudier. Ils organisent des cérémonies (payantes), mettent en scène leurs propres rituels et en font la promotion avec un professionnalisme dont ne rougirait pas la plus sophistiquée des attachées de presse. En deux générations, ils ont appris l’argent, le papier de toilette, la politique internationale, le téléphone, l’école obligatoire. Ils manient les institutions et les gadgets avec art et sagacité …

Parfois, ils regagnent la place que leur avaient assignée l’imaginaire ethnologique et les fantasmes de la société moderne… Ils revêtent leur panoplie de guerrier et menacent de tout casser. Ils s’énervent, pour des raisons qui échappent à tous ceux qui ne sont pas Baruyas, à commencer par les ethnologues. Quand un conflit menace ou éclate en pays Baruya, l’administration se dépêche d’ailleurs de mettre ces derniers à l’abri, à moins de les y laisser perfidement, en préméditant qu’ils se feront manger et que ce sacrifice apaisera les tensions. C’est que les ethnologues énervent les Baruyas. Ils préfèrent encore les missionnaires, c’est tout dire. Pourquoi ? Parce que les scientifiques ne répondent jamais aux questions. Et quand ils en posent, ils prennent les réponses sans tenir compte de l’interlocuteur. Ces savants étudieraient des grands singes avec la même sympathie et la même distance.

« Il n’y a pas de bas morceaux dans le gras ethnologue », console un proverbe bantou, raconte Alexandre Vialatte. Les Bantous savent d’expérience ce qu’il en est de la position épistémologique des ethnologues. Au moins, devant un missionnaire qui les menace de l’enfer, ils savent à quoi s’en tenir. (« Si tu ne digères pas la soutane, évite de manger le missionnaire »). Ils ont face à eux un semblable, qui, certes, se croit supérieur, mais qui reste fondamentalement « prochain ». Quant à l’ethnologue, il se situe dans un au-delà du Baruya, au-delà éventé, tristounet, unidimensionnel et mesquinement incompréhensible…

Abandonnons cette incursion en pays Baruya ou Bantou, pour en venir à l’entreprise occidentale, et à son entourage de consultants et de chercheurs en gestion et en sciences humaines. Ce cortège d’experts accompagnent l’entreprise et lui prêtent un véritable intérêt, une curiosité scientifique non dénuée de bienveillance. Ils examinent à la loupe les comportements à l’intérieur de l’entreprise, ils érigent les relations et les rapports sociaux en systèmes plus ou moins agrégés, plus ou moins cohérents… Ils analysent les pratiques de coopération, de coordination, de collaboration ou de compétition à l’aide d’une large palette de concepts, où l’on retrouve pêle-mêle les catégories de la psychologie clinique, les théories de la motivation ou de la cybernétique, les classifications de la sociologie, etc. Je repère également celle de l’anthropologie, avec sous la plume de Claude Riveline, notamment, l’entreprise décrite comme peuple avec ses rites, ses mythes et ses tribus… De là aux Baruyas…

La posture que se partagent les chercheurs et les consultants est celle d’une coupure. D’ailleurs nombreux ont besoin de s’en défendre, de s’expliquer de cette distance, de la cicatriser en quelques sortes, voire de la nier en invoquant qui un rapport privilégié au terrain, qui d’autre une expérience censée assurer une proximité à celui-ci, etc. Quoi qu’il en soit, les chercheurs et les consultants se coupent des salariés, au nom d’un savoir. Ils s’en coupent au sens où ils n’accordent pas d’importance aux interprétations et aux constructions de sens que se font les gens dans l’entreprise à propos de ce qui arrive à celle-ci, ou à eux-mêmes. Chercheurs et consultants prêteront davantage attention aux dirigeants, mais dans bien des cas, cela ne sera qu’une feinte, qu’une politesse rendue au fait qu’ils sont invités (ou grassement payés) par le patron pour l’étude ou l’accompagnement de l’entreprise dans le sens demandé.

La posture épistémologique du consultant et du chercheur en sciences humaines qui ne prennent en compte la parole (ou alors comme un discours produit par conditionnement), entraîne une « dépossession » du propre devenir des hommes à l’intérieur de l’organisation. L’assujettissement du salarié commence par sa dissolution dans le discours savant sur l’organisation (discours scientifique de l’universitaire ou professionnel du consultant). Cette position savante qui n’intègre pas la parole des intéressés déshumanise l’entreprise, quelles que soient les pratiques à l’intérieur de celle-ci. Mieux vaut d’ailleurs un dirigeant cynique qui gère ses troupes comme des ressources, ou qui les conduit comme un général à la bataille, qu’un intervenant bien intentionné qui prétend comprendre et jouer sur les ressorts cachés de l’organisation et de l’individu. L’inhumanité, ce n’est pas tant celle de l’organisation que celle de l’appareil savant qui affirme que les individus peuvent être coupés dans le sens de la parole.

Précaution – préconisation : Attention à ne pas confondre précaution (acte, disposition, mesure, principe) et préconisation (recommandation, mise en garde, conseil). Une mesure de préconisation non seulement n’est pas efficace, mais n’en est pas plus heureuse pour autant.

Prémisse : chacune des deux premières propositions d’un syllogisme. Tous les hommes sont mortels. Socrate est un homme = prémisses n°1 et n°2 du célèbre raisonnement qui se conclut par : Socrate est mortel. Voir les variations de Lewis Carroll sur ce thème. Éviter la confusion avec prémices, toujours au pluriel, qui signifie à l’origine les premiers produits d’un travail agricole, et par analogie, les premiers effets, les commencements de la manifestation d’un phénomène.

Prendre parti : pour ou contre quelqu’un ou quelque chose, c’est se ranger dans un camp, se décider pour ou contre, prendre position, se battre.

Prendre à partie : accuser, dénoncer publiquement, interpeller une personne ou un groupe.

Prénom : comme son nom l’indique, vient avant le nom. Dans un CV, effet rédhibitoire de la fiche de police (Dussard Armand risque fort de rester dans la pile).

Président : titre très différent selon les entreprises dans le monde anglo-saxon. Tantôt accordé au Chief Executive Officer, tantôt au Chairman (voir ces mots). En français, président ne prend pas de majuscule, sauf quand on désigne le Président des États-Unis. Mais on écrit le président Sarkhozy ou l’ancien président, ainsi que les présidents des entreprises du CAC 40. Je souhaite bien du plaisir à toutes les équipes des directions de la communication pour faire enlever les majuscules intempestives des plaquettes, courriers et autres documents où on les fourre obstinément.

Pressurer – pressuriser : non, on ne pressurise pas les contribuables, même pas notre Johnny (inter)national. À la rigueur, on les pressure, mais on fait gaffe à ne pas faire la confusion entre tirer tout ce qu’on peut de quelqu’un et maintenir une pression d’air normale dans une atmosphère raréfiée. La pression fait le bonheur des correcteurs de traduction : lu un jour par un éditeur d’ouvrages scientifiques : l’angoisse de l’huile au fond du saladier pour la pression de l’huile dans le carter.

Prétendu : attention à l’emploi incorrect de « soi-disant » à la place de prétendu. On dira « une prétendue synergie», parce qu’elle ne peut évidemment pas être une « soi-disant synergie » : la synergie ne peut pas s’appeler ainsi elle-même. De même un prétendu Château Petrus (et jamais un soi-disant, la bouteille ne parle pas, ou alors seulement pour ceux qui en ont abusé). Pour les choses et les animaux, il faut employer prétendu. De même lorsqu’il s’agit d’un qualificatif attribué à quelqu’un qui ne le revendique pas : comparer un soi-disant espion (quelqu’un qui veut se faire passer pour un espion) et un prétendu espion (quelqu’un qu’on veut faire passer pour un espion).

Prioriser : quelle horreur ! Hiérarchiser, définir des priorités. À propos des priorités, je suis parfois perplexe devant des priorités qualifiées de premières. Quand il y a deux ou trois priorités, c’est vrai qu’une d’elles peut être prioritaire sur les autres… Mais à ce compte, on ne s’en sort plus.

Pro : abréviation inévitable dans le jargon managérial (et ailleurs). « Ce n’est pas pro », notez le joli petit plissement de la bouche, on dirait un cul de poule si le petit pro ne faisait pas crotte de lapin, mignonne mais redoutable quand même.

Proactif : c’est évidemment plus court pour dire « qui est force de proposition » ou « qui agit avant qu’il ne soit trop tard », mais c’est du jargon qui empâte la bouche, et qui classe le manager qui en fait un usage abusif. De plus, en anglais auquel le terme est emprunté, « proactive » n’est pas plus joli. Les Anglais préfèrent « active » ou « energetic ». On ne dira jamais assez que lorsqu’on emprunte à l’anglais, il faut éviter d’en importer les lourdeurs voire les erreurs.

Probant, probe : probant vient du latin probare, prouver, et signifie « qui prouve sérieusement, convaincant, décisif, concluant ». Probe est aussi un adjectif, mais signifie tout simplement honnête, intègre.

Processus : parfois on rencontre, dans le sens de processus, le synonyme « procès », importé sans doute directement de l’anglais « process ». Procès est plus didactique que processus, donc plus lourd et moins élégant. Parfois, il faut penser à procédé, qui traduit aussi de manière précise un ensemble de méthodes ou une série de techniques pour obtenir quelque chose.

Prodige : événement ou personne extraordinaire. Ne pas confondre avec mot suivant.

Prodigue : qui fait des dépenses excessives.

Prolifique – prolixe : un lapin prolifique fait beaucoup de petits ; un manager prolixe fait beaucoup de discours (longs, hélas trop longs).

Prolongation – prolongement : la prolongation d’une séance (délai ou temps supplémentaire) et le prolongement d’une route (allongement, ajout d’espace). Par métaphore, on dit les prolongements d’une affaire ou d’une crise pour parler de ses conséquences ou de ses suites.

Protagoniste : ne pas utiliser pour dire acteur, interlocuteur ou partenaire. Le sens premier du mot est le personnage principal dans une pièce de théâtre, et par extension, celui qui tient le premier rôle, ou un des premiers rôles sur n’importe quelle scène. Un protagoniste est toujours principal ou premier, donc inutile de le préciser.

Public : en Angleterre, les « public schools » sont les écoles que des gens paient très cher pour y faire éduquer leurs enfants. C’est le contraire de nos écoles publiques en France ou aux États-Unis (en anglais britannique State schools). Attention à ce redoutable adjectif faux-jeton dans le contexte des affaires : une « Public Company », c’est une entreprise à capitaux privés (société anonyme), en Angleterre ou aux Etats-Unis. « This company went public » pour dire qu’elle s’est tournée vers la bourse pour trouver des investisseurs. Au contraire des entreprises publiques en France qui sont détenues et en général gérées par l’État.

Publiciste - publicitaire : le publiciste désigne un juriste spécialiste de droit public, le publicitaire est quelqu’un qui travaille dans la pub.

12 janvier 2006 dans P | Lien permanent | Commentaires (2) | TrackBack (0)

Quasi : sans trait d’union devant adjectif. Mais quasi-débit, quasi-contrat, etc.

Quoique : élision seulement devant il, elle, on, un et une.

Quelque : parfois adverbe, donc invariable, comme dans l’exemple "quelque faibles que les résultats soient…"

12 janvier 2006 dans Q | Lien permanent | Commentaires (1) | TrackBack (0)

Raconting : se dit aussi storytelling, dans le jargon des communicants. Méthode de management apparue vers 2000, qui a beaucoup fait couler d’encre, mais assez curieusement, ne semble pas avoir « pris ». Il faut dire que le concept est un peu vaseux. Le raconting vient du «storytelling» qui, selon certains journalistes, essayistes et gourous américains du management, aurait mis la communication dans tous ses états. Mesdames, Messieurs, le reporting est mort, vive le raconting. C’est bien connu, chiffres, données, faits ennuient ; ce qu’il faut pour convaincre, ce ne sont pas des arguments, mais des histoires. Un leader ne fait pas de rapport ; un leader raconte une image, une légende, un mythe … <>

Très séduisant, certes, mais n’est-ce pas un peu prendre ses désirs pour des réalités ? Ou plutôt, chacun sait que la réalité embête. On ne prend pas les mouches avec du vinaigre. Donc, pour convaincre, pour séduire, embobinons les chalands avec le miel d’un bon récit.

Deux remarques : - la tension narrative dans un rapport, même sur le sujet le plus rébarbatif à première vue, est l’abc de la communication. Depuis la nuit des temps. Comme le ferait remarquer Alexandre Vialatte, l’histoire remonte à la plus haute Antiquité. Le raconting me fait rigoler, n’empêche que lorsque je travaille sur un rapport ou sur un article soumis par un client, je commence d’abord et toujours par chercher la «séquence narrative» (constat, complication, question et message clé). Et si je ne la trouve pas, et bien je l’invente. Avant moi, et après, des milliers de « plumes » et de conseillers en communication ont fait et feront la même chose. Le raconting n’a donc rien inventé, hormis le ridicule du terme.

- Prendre son public pour un panier de poires est dangereux. La manipulation, surtout en politique, est à double tranchant. Celui qui raconte une histoire peut se prendre à son propre jeu. En revanche, celui qui l’écoute peut se dépêtrer des intentions pas toujours avouables, ou avouées. Dans certains domaines, en particulier le domaine politique, il faut des arrières solides, les sacs de sable des données, des chiffres, des faits. La conviction seule ne suffit pas à étayer des raisonnements ou des histoires. Il faut pouvoir coltiner les arguments avec la réalité sans risquer de les pulvériser au premier contact.

Néanmoins, il faut bien admettre qu’un «I have a dream…» est bien plus intéressant que l’annonce d’un programme «réduction de coûts, augmentation du chiffre d’affaires et intéressement».

Le film de Al Gore est d’autant plus intéressant que sa présentation des changements climatiques est «chiante» en langage de communicant : insistance, démonstration, complication, lourdeur … Je me demande pourquoi les écolos avec les mêmes arguments, les mêmes analyses, les mêmes faits n’ont jamais réussi la percée qu’ils attendaient, au moins sur le plan électoral. Mais l’histoire qu’ils racontent n’est pas celle des gens qu’ils essayent de convaincre. Tandis que Al Gore réussit à tenir en haleine son public sans essayer de persuader par la conviction ou la dramatisation, mais par la présentation des faits. A méditer.

Se rappeler : je me souviens que les profs de français insistaient beaucoup sur une savante distinction entre se rappeler et se souvenir, mais je ne me le rappelle pas. Ah, si. On se souvient de quelque chose et on se le rappelle. Je veux dire on se rappelle quelque chose, pas de quelque chose.

S’en rapporter à quelqu’un : se fier à quelqu’un. Ne pas utilisez pour se reporter à qui signifie se référer à, chercher un appui, une preuve, une démonstration dans quelque chose.

Re - : chercher et rechercher, grouper et regrouper, entrer et rentrer, etc. On abuse peut-être un peu du préfixe, l’usage des verbes simples semblant disparaître. Comparez : chercher un compromis et rechercher un compromis. Chercher, c’est essayer de trouver et ce verbe simple suffit le plus souvent. Rechercher comporte une idée de difficulté, d’effort, d’intensité, de gravité, voire d’urgence. Trop d’urgence tue l’urgence, alors ne l’utilisez qu’avec parcimonie, si vous ne voulez pas glisser dans l’insignifiance de la gonflette. La même remarque pour les autres verbes qui s’habillent trop souvent du préfixe re-.

Réaliser : l’expression (réaliser un but) est incorrecte. Il faut dire atteindre son but ou ses objectifs. Le sens anglais (se rendre compte de, se faire une idée nette) n’est pas non plus reconnu en français. D’après Hanse, il a pourtant d’excellents répondants (Gide, Mauriac, etc.). Réaliser : s’effectuer, devenir réel. Ses prédictions se sont réalisées. Signifie aussi accomplir pleinement sa nature, son idéal.

Recouvrir : ne pas confondre ce verbe avec recouvrer dans l’expression par exemple : l’entreprise a recouvré la rentabilité (a renoué avec la rentabilité, a retrouvé la rentabilité). Souvent, on voit l’utilisation fautive de « a recouvert ».

Repaire, repère : un repaire de brigands ou de serpents ; un repère pour s’y retrouver dans un ensemble d’objets, de lieux, de dates, de concepts, etc. Vous allez rire mais la confusion se rencontre. Dans un texte de consultant, c’est insultant.

Repère : on en manque toujours (je crois que le lieu commun est déjà répertorié dans Bouvard et Pécuchet).

Reporting : le sens anglais de faire des rapports à des supérieurs hiérarchiques ou d’être sous les ordres de quelqu’un n’a pas d’équivalent français direct. Rapporter se dit et s’écrit, mais l’usage n’est pas attesté par le Petit Robert et les puristes rechignent à l’employer. Je crois néanmoins que le terme est parfaitement compris. On parle également de rattachement, de se rattacher à ou d’être rattaché à. En revanche, j’ai des difficultés à traduire le substantif. Communication est trop vague pour le fait de rendre des comptes. Quelques essais de traduction du verbe ou du nom : He reports to the board : il dépend directement du comité d’administration They report to me : ils sont sous mes ordres They will report it : ils feront leur rapport, ils le signaleront (aux autorités). He will be reported to the boss : son comportement sera signalé au patron. Reporting restrictions : embargo (dans la presse). The reporting is not transparent in this company : les lignes hiérarchiques ne sont pas claires dans cette entreprise.

Résidant : quelqu’un qui habite un endroit, quelle que soit son origine : les résidants de la région parisienne. Pour lever la confusion avec résident, ou s’épargner des hésitations, on peut essayer de remplacer par habitant.

Résident : quelqu’un qui habite dans un autre pays que son pays d’origine : les résidents belges en France.

Résilience : capacité à vivre, à se développer en surmontant l’adversité, les traumatismes. Concept de la psychologie réinventé par le management. Ce n’est pas une raison pour enfler le sens de n’importe quoi.

Résigner : s’emploie transitivement, dans l’expression résigner ses fonctions qui signifie se démettre volontairement, démissionner, renoncer à ses fonctions. Se résigner à : accepter, se résoudre à quelque chose de désagréable.

Résilier : mettre fin à (un contrat), annuler (un accord, un engagement).

Résoudre : verbe à la conjugaison bizarre. « Résolu » est le participe passé du verbe résoudre signifiant « déterminer, décider, arrêter une solution». La forme « résous, résoute » s’utilise (rarement) en parlant d’une chose transformée en une autre, du crachin, par exemple, qui s’est résous en pluie. Vous pouvez aller le vérifier dans le Grevisse, résoudre a l’air d’être un sacré numéro (article n° 1607 du Bon Usage).

Ressortir : se conjugue comme sortir et signifie tout simplement sortir de nouveau, par extension, faire saillie, se dégager et au figuré apparaître comme une conséquence. Il ressort (ou est ressorti) de la réunion un plan d’action en trois points. Ne pas confondre avec ressortir à, verbe qui se conjugue comme finir, et qui signifie dépendre de, relever de, être de la compétence de. Cette décision est du ressort du comité de direction, ou ressortit au comité de direction.

Revue : (pour traduire le mot anglais « review »), ne pas utiliser revue pour passage en revue, critique, examen, contrôle, vérification… On ne fait pas la revue des comptes, mais on les vérifie.

Risquer : ne pas utiliser à la place de « avoir des chances de ». La décision risque de provoquer la rupture des négociations, et non « la décision a des chances de provoquer »… En français, le risque est toujours associé à quelque chose de fâcheux, il faut s’y faire plutôt que le nier. Vouloir instaurer une « culture du risque » est un non sens sémantique. Il vaut mieux parler d’une culture de l’initiative, de l’exploration, etc.

12 janvier 2006 dans R | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Scénario : au pluriel, scénarios. L’usage de scénarii formé sur le pluriel latin semble plus pompeux que correct, car l’accent sur le e montre la francisation du mot. Scenarii s’écrit aussi, mais franchement, « scénarios » passe très bien.
Sceptique : il faut choisir entre le soupçon (sceptique), et la contamination (septique). Voir septique.
Second : les puristes prétendent utiliser ce terme quand on dénombre des choses, la première, la deuxième, et qu’il n’y en a pas de troisième. N’est-ce pas un peu idiot ? On pourrait discuter à l’infini de savoir s’il faut parler de la Seconde ou de la Deuxième Guerre mondiale.
Secteur
: il faut dire secteur bancaire plutôt qu’industrie de la banque ; d’ailleurs pourquoi ne pas dire tout simplement la banque (sans majuscule, bien entendu) ? Ne pas écrire le secteur des services, mais le secteur tertiaire ou le tertiaire ou les services tout court.
Sécurité : ne pas confondre avec sûreté, même si les deux mots sont très proches. Sécurité est un état qui résulte de l’absence de danger, ou le sentiment que donne cet état, ou encore les organismes qui assurent cet état (Sécurité sociale). La sûreté se dit des précautions qui assurent la sécurité. Elle désigne également la précision et l’efficacité.
Sensé – censé
: sensé vient de (bon) sens ; un homme sensé ; une remarque sensée. Censé vient du verbe « censer », mot défunt qui signifiait estimer, juger. Censé est toujours suivi d’un infinitif (rarement sous-entendu) : il est censé être à Paris ; elle est censée connaître le règlement. Pas de « de » avant l’infinitif.
Se sentir suivi d’un infinitif ; le participe s’accorde avec le sujet si le sujet du verbe pronominal est aussi sujet de l’action exprimée par l’infinitif : elle s’est sentie renaître (elle renaît) ; ils se sont sentis défaillir (ils défaillent). Elle s’est sentie mourir (elle meurt). Si le pronom est l’objet direct de la phrase à l’infinitif, pas d’accord du participe : elle s’est senti piquer par le moustique (le moustique l’a piquée). Ils se sont senti rouler par l’avocat de leur client (le client les a entubés).
Septique ou sceptique ?
Il faut choisir entre le désinfectant (antiseptique) et le soupçon (sceptique).
Sigles : faut-il des majuscules ou non ? Tout dépend de la façon dont on prononce ces agrégats d’initiales. SNCF, USA, CPE, FO, OGM, CNRS ; PME (notre époque a laissé tomber les points séparant les initiales) : les majuscules s’imposent lorsqu’on prononce séparément toutes les lettres. Mais on écrira Unesco, Cnam, car on prononce ces sigles comme des mots (on parle d’acronyme). Lorsque ces mots deviennent communs, ils perdent même leur majuscule initiale (ex : ovni, laser) ; (voir acronyme). L’Organisation des nations unies s’abrège en ONU ou Onu, selon la manière dont on prononce le sigle. Recommandation expresse : lorsque vous développez un sigle pour faciliter la vie de votre lecteur, surtout ne mettez pas de majuscule à tous les mots. Certains se croient même obligés de graisser la police des initiales. Le CPE est le contrat première embauche (paix à son âme) et non le Contrat Première Embauche. Si le sigle abrège une expression en anglais, on laisse les majuscules dont cette langue est friande. Par convention, la première fois où l'on utilise l’expression dans un texte rédigé, on commence par l’écrire en toutes lettres, et on fait suivre par le sigle entre parenthèse. Dans la suite du texte, on n’utilise plus que le sigle. Par exemple l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact). Pour ceux qui cherchent à égaler les Monty Pythons dans How to irritate people, les sigles sont de merveilleuses petites machines : si vous voulez dégoûter les autres de vous lire ou de vous écouter, semez des sigles à profusion dans vos écrits, vos discours. Effet garanti. Il y a encore mieux : interrompre l’interlocuteur et d’un air innocent lui demander : « pardon, je n’ai compris, que signifie le Cif, le Pos, l’ESPC, le CCIP, etc. ? ». Et voilà le malheureux obligé de s’interrompre, de s’excuser et de s’expliquer (vous ne l’écoutez déjà plus, beaucoup trop occupé à regarder votre petit effet sur la tête de ceux qui vous entourent, le plus souvent ravis de la diversion. En plus, c’est vous qui passez pour le malin, et le sigleur pour un cuistre).
Signaler : attirer l’attention, informer, prévenir.
Signaliser : marquer par des repères visuels, des signaux.
Significatif
: attention quand on traduit le faux ami anglais significant. Utiliser appréciable, substantiel, sensible, important.
Soi-disant
: voir prétendu.
Soldes : pour désigner la période de rabais commercial généralisé, toujours au masculin pluriel. Des soldes intéressants. Erreur excusable mais néanmoins idiote et évitable.
Solutionner
: on le lit, on le dit, mais ne serait-ce pas plus simple et surtout plus joli de dire régler, résoudre, dénouer, etc. ? La laideur du mot évoque la platitude de "finaliser" ; la balourdise des deux singe la barbarie de la "solution finale".
Start-up nom féminin, invariable, des start-up. Dire aussi jeune pousse, mais il faut bien reconnaître que cela ne passe pas, alors on utilise sans vergogne start-up.
Stratégique : bien réfléchir quand on veut employer ce mot. Se demander si on ne peut pas mettre à la place : important, décisif, majeur, capital, à long terme… Voire catastrophique : beaucoup de décisions dites stratégiques ont eu des conséquences imprévisibles et destructrices (par exemple, décision d’IBM de ne pas fabriquer les processeurs et de laisser à sa filiale Intel le soin de le faire, puis de revendre sa filiale). Tout peut paraître stratégique dans l’entreprise, quand on regarde les choses d’un certain angle. Encore un mot que le management emploie dans sa tentation de tout confondre, de rendre tout indifférencié… Exiger pour soi-même de donner un contenu partageable à cette notion. L’exercice de l’antonyme est intéressant : le contraire de stratégique, dans l’art militaire, c’est tactique. En entreprise, c’est opérationnel, etc.
Suite à : les puristes n’aiment pas. Ils prétendent remplacer par « par suite de », ce qui, à mon avis, est encore pire. « À la suite de » passe peut-être mieux, mais annonce souvent des phrases kilométriques et ennuyeuses. Coupez, coupez, et reformulez. Exemple : à la suite des recommandations du comité de direction quant à la réorientation du pilotage du projet d’abandon de la fabrication de la molécule XYV et du redéploiement des équipes sur les sites de Z et de W, l’équipe de pilotage a décidé de nommer un nouveau chef de projet plus proche des équipes. Écrire plutôt : un nouveau chef de projet, proche des équipes, a été nommé. Il s’agit de se rapprocher du terrain pour aider les personnes concernées par l’abandon de la fabrication de la molécule XYV. Le comité de direction qui en a décidé veut en effet mettre tout en œuvre pour que le redéploiement se passe bien.
Sunk costs
: se dit de dépenses qui ne sont pas récupérables, par exemple lors de la création d’une entreprise ou du lancement d’un nouveau produit : coûts de la recherche et développement, des campagnes de communication... Les financiers et les investisseurs ne veulent pas dire autre chose que «fonds perdus», mais ils préfèrent, pour d’obscures raisons linguistiques non identifiées, parler de « sunk costs ».
Supply chain
: dit plus que sa traduction littérale – chaîne d’approvisionnement. Se traduit généralement par chaîne logistique globale. Encore une fois, l’utilisation de l’anglais indique une certaine distanciation du locuteur, par rapport à ce qu’il dit, ou par rapport à vous.. Si votre client n’a que le mot « Supply Chain Management » à la bouche, attendez-vous à ce qu’il vous parle rationalisation, réduction des coûts, et qu'à un moment ou à un autre, il prononce l’inévitable rapport win-win qui vous fera une belle jambe.
Supporter : encore un faux ami anglais quand on veut parler d’une équipe ou d’un projet qu’il s’agit d’appuyer, épauler, soutenir, encourager. Supporter son patron n’a pas le même sens que le soutenir, à moins qu’il soit très mauvais. Encore une fois la faute de français vient d’une lacune en anglais. Les Anglais supporters de foot « supportent » leurs équipes, les Français les soutiennent. Nuance.
Sur
: la préposition remplace de plus en plus à, vers, dans. J’habite sur Paris, entend-on pour vraisemblablement habiter à Paris, ou près de Paris, ou encore dans la région parisienne. Les journalistes parviennent à résister, mais dans le langage courant, en RER ou à la machine à café, le « sur » semble avoir gagné. Au secours, que fait l’Académie française ? Elle ignore, pas au courant de cette entourloupette prépositionnelle. Sans doute, sous la coupole, nul ne s’aviserait de dire qu’il siège dessus. Quand et où cette faute est-elle apparue et par quels canaux s’est-elle généralisée ?
Stupéfait
: adjectif et pas participe passé ! il n’existe pas de verbe stupéfaire. Donc on n’écrit pas « le juge a été stupéfait par ces révélations » mais on dit à la place « il s’est montré stupéfait devant ces révélations » ou « ces révélations l’ont stupéfié.
Stupéfier
: rendre stupide ou stupéfait. Voir stupéfait.
Susceptible de
: le sens se confond parfois avec celui de« capable de ». Susceptible se dit surtout des choses qui sont capables de changer, d’être utilisées différemment : ce projet est susceptible de modifications. Ces vacances sont susceptibles d’être ratées. Ce matériau est susceptible d’altérations. Capable de se dit surtout de créatures, humaines ou autres : l’homme est capable de s’adapter à toutes sortes de régimes alimentaires. Le chameau est capable de vivre dans le désert des jours sans boire.
Swap : accord de crédit réciproque. Le Petit Robert recommande : crédit croisé, échange financier.
Swift : acronyme de l’anglais pour Society for Worldwide Interbank Financial Telecommunications.
Synergie : encore un mot qui fait partie de la boîte à outil de la rhétorique managériale, avec les expressions « mutualiser les compétences », « prioriser les actions » et « implémenter le changement ». Mais il n’y a pas d’autres mots pour désigner l’action coordonnée de plusieurs éléments – forces, compétences, savoir-faire, etc. L’exploitation des synergies sert toujours d’alibi industriel aux rapprochements opérés en bourse. Parfois trop grosse, la ficelle. Le mot est galvaudé, mon dieu qu’il date les années 90. Redondance qui échappe encore à la vigilance des éditeurs : « mutualiser les synergies » (partager les partages…). Bravo !
Systémique
: le nom désigne à la fois la théorie des systèmes complexes et toute technique s’y rapportant. Systémique est également un adjectif savant pour qualifier ce qui se rapporte ou qui touche un système dans son ensemble (représentation systémique d’un problème, par exemple, où sont prises en compte notamment les relations entre les variables). Ne pas confondre avec systématique. Systématique : le nom désigne la science des classifications des êtres vivants et le « corpus » de notions et de vues relevant d’un système de pensée (la systématique hégélienne ou marxiste). L’adjectif est employé couramment pour qualifier (je simplifie, consultez un bon dictionnaire pour plus de précision) : 1. Ce qui relève d’une méthode, dans un cadre et un ordre bien définis (une réflexion, un travail, une recherche systématique) ; par dérivation péjorative, ce qui tombe dans l’absolu de la logique, souvent jusqu’à l’absurde : une volonté systématique de nuire, un refus systématique. 2. Qui se rapporte ou qui constitue un système bien déterminé : l’astronomie systématique de Ptolémée, la terminologie systématique de Linné.

12 janvier 2006 dans S | Lien permanent | Commentaires (2) | TrackBack (0)

Tache et tâche : cela m’amuse toujours de lire des descriptions de taches. Le petit chapeau de l’accent circonflexe, en haut à droite du clavier, s’avère indispensable pour éviter l’insolation du ridicule. Si votre petit doigt refuse obstinément le grand écart de ce côté du clavier, ce n’est pas une raison pour virer à l’anglais « job description ».

Tacler : verbe transitif, faire un tacle à quelqu’un, de l’anglais tackle, au football = déposséder un adversaire du ballon, en faisant sans doute quelque chose de spectaculaire ou de sportif. C’est peut-être une variante de saisir la balle au bond … Utilisation journalistique. Attention, ce n’est pas parce qu’on fait du foot qu’on peut « tacler un problème ». Là, il y a abus de langage, méconnaissance de l’anglais, confusion des sens et des sons. On tacle quelqu’un, soit, mais on s’attaque à un problème.

Tant chez lui que chez moi : ne pas oublier la répétition de la préposition après le deuxième terme de la comparaison introduit par que.

Tant qu’à faire que de l’inviter : correct mais tant qu’à l’inviter est plus simple et plus joli.

Task force : groupe de travail.

Team : c’est curieux comme le mot anglais au milieu d’une phrase en français semble en dire plus … L’utilisation de l’anglais semble charger le mot d’un sens plus dynamique, plus intense, plus professionnel. C’est un vieux truc. À une certaine époque, les philosophes français truffaient leurs textes de mots allemands longs comme des trains de marchandise. Mais team n’est pas un mot savant. Sa traduction ne pose aucun problème, au contraire de leadership ou gouvernance, par exemple, qui sont forgés sur l'anglais et qui ont toute leur place dans le vocabulaire parce qu'ils n'ont pas d'équivalents français. Il n'y a pas de honte à les employer. Mais on évite la pédanterie de remplacer un mot simple et courant par un mot anglais, juste pour faire compliqué. On effacera donc « team » et on utilisera « équipe » comme tout le monde.

Technique : qui appartient à un domaine spécialisé de l’activité ou de la connaissance. Dit moins ou autre chose que technologique. La plupart du temps, technique suffit.

Technologie : qui appartient à l’étude des techniques. Les progrès technologiques sont des avancées dans les connaissances et l’étude des méthodes, des outils, des matériaux. Le terme technologie est parfois abusivement utilisé pour désigner les techniques de pointe.

En termes de : termes toujours au pluriel.

Trade-off : Le terme anglais est utilisé en français informatique, d’où il a vraisemblablement gagné le management et le politique. À moins qu’il ne soit directement importé de la théorie économique. Lu dans l’intitulé d’une conférence : « Croissance et inégalités en Europe : trade-off ou win-win ? ». Le trade-off consiste à comparer et à choisir entre deux choses, deux objectifs, deux propositions … L’opération implique un calcul d’intérêt et un renoncement. On dit arbitrage. En français, la conférence aurait pu s’appeler «croissance et redistribution en Europe : arbitrage ou jeu gagnant-gagnant ?».

Traduction : cinq astuces pour bien faire traduire vos textes. 1. Vérifiez que la langue maternelle de votre traducteur est bien la langue dans laquelle vous avez commandé la traduction. Les bons traducteurs dans deux ou trois langues cibles se comptent sur les doigts de la main, comme les joueurs de tennis ambidextres. 2. Un bon traducteur est toujours spécialisé dans un, voire deux domaines. Si vous passez par une agence, vérifiez qu’ils ont des pôles de compétences bien définis. Si vous traitez avec un traducteur particulier, vérifiez qu’il connaît bien le domaine dont parle le texte que vous lui demandez de traduire, par exemple en lui demandant de quoi parlait le dernier texte qu’il a traduit. 3. Demandez à votre traducteur d’établir un lexique. C’est un gage de travail sérieux. Passez ce lexique en revue (même si vous ne connaissez pas une des deux langues, la source ou la cible, vous pourrez vérifier et éventuellement améliorer la terminologie dans la langue que vous maîtrisez). 4. Attendez-vous à des questions en cours de travail. Un bon traducteur en pose toujours. Le plus il vous fait travailler, le mieux votre traduction se portera. 5. Un bon traducteur travaille toujours en au moins deux temps : il vous envoie un premier jet, sur lequel il vous pose généralement des questions ; ensuite, il vous propose une deuxième version relue et corrigée. Si le traducteur vous suggère de faire relire son travail par une tierce personne, c’est qu’il s’agit vraiment d’un pro. Le service est généralement fourni par les agences. Testez-la sur ce point. Les bonnes agences ont des correcteurs spécialisés et bien rémunérés. C’est d’ailleurs un des seuls avantages de l’agence par rapport au traducteur-maison.

Transparence : péjoratif en parlant d’une personne (cela signifie qu’elle passe inaperçue, qu’elle manque de consistance, etc.). Le mot anglais se traduira pour décrire quelqu’un par intègre, loyal, direct, etc. Le terme transparence s’est imposé en parlant de procédures, de réseau, de communication. J’aime pour ma part les mots clarté, évidence, limpidité, qui ne charrient pas les opacités philosophiques et surtout politiques de la transparence. Évidemment, un texte n’est jamais transparent (sauf s’il est écrit à l’encre invisible, me fait judicieusement remarquer un enfant). La langue de bois aime beaucoup dénoncer le manque de transparence, chez l’autre, bien entendu. L’exigence de transparence est très à la mode dans le monde politique. Gare à la contagion dans l’entreprise. Il est impossible de tout dire. L’opacité du langage est une donnée. Le langage a toujours une ombre, que l’idéologie de la transparence voudrait faire passer pour de la fausseté ou de l’hypocrisie, ou du calcul, ou de la malveillance. Un monde entièrement transparent serait un monde où rien ne se passerait, un monde figé, un monde mort.

Transversal : aujourd’hui, un projet qui se respecte est forcément « transversal », dans un monde global (où la concurrence est de plus en plus rude, le changement de plus en plus rapide, etc.). La transversalité est la capacité ou la propriété de concerner plusieurs fonctions ou plusieurs départements dans une organisation structurée à la papa.

Ultérieur : se dit d’un fait situé dans l’avenir par rapport au présent ou au passé. Le plan de communication prévoit une réunion de tous les salariés, qui sera fixée ultérieurement. "Postérieur" se dit d’un fait du passé situé après d’autres faits du passé.

Usé : qui est hors d’usage.

Usagé : qui est toujours utilisable, même s’il a beaucoup servi.

Thérèse Sepulchre

12 janvier 2006 dans T | Lien permanent | Commentaires (2) | TrackBack (0)

Vanille : ne faites pas comme moi, et ne traduisez pas bêtement « vanilla » ou « plain vanilla » en parlant d’options en finance. En anglais, « plain vanilla » ou « vanilla » signifie simplement « ordinaire », sans complication, comme la glace au parfum du même nom. On les dit « vanilla » par opposition à « exotic», (en français options exotiques, ou de seconde génération, plus complexes). La finance a aussi inventé : être chocolat (quand on est dans la panade)

Valeur travail : la forme de l’expression est intrigante. Pourquoi cette élision ou cette contraction de la préposition et de l’article ? Pour dynamiser le discours ou pour appauvrir le langage ?

Difficile de savoir si l’expression s’est imposée à partir du management ou du politique. Quoi qu’il en soit, cette valeur a la cote. On n’entend plus parler que d’elle. Attention aux intentions vertueuses et didactiques, elles peuvent se retourner contre ceux qui en ont plein la bouche et qui prétendent par des discours inciter les autres à « retourner » au travail, alors que souvent, c’est le travail qui ne veut pas de certains. Ou alors, c'est le problème non de la valeur du travail, mais celui de la valorisation de l’emploi qui se pose. Quant à affirmer que le travail est une source de satisfaction et de réalisation de soi, c’est enfoncer une porte ouverte, à moins d’ériger des cas isolés mais notoires de pathologies (fainéantise ou inaptitude) en classe sociale ; c’est parfois faire fi des conditions difficiles de l’exercice, surtout pour certains types de travail, ou à certains moments de la vie (voire de la semaine, maudit lundi). Mais la peine, le coltinage quotidien avec la difficulté et avec des collègues, font partie du travail, c’est le travail du travail et la plupart des travailleurs, quels que soient leur activité et leur niveau dans l’échelle socioprofessionnelle, « font avec » cette réalité. L’organisation, notamment celle de l’entreprise, est censée décupler l’efficacité du travail, notamment en réduisant sa pénibilité. À moins que celle-ci soit niée, justement au nom de la « valeur travail », et que sa charge soit remise sur le dot du seul salarié, sommé d’être heureux, décontracté, motivé et compétent « par lui-même ». Paradoxe : le déni de la difficulté du travail (initié par un certain management) est le commencement de la fin du management et le cours de la valeur travail pourrait bien évoluer inversement à ceux de la valeur organisation, de la valeur coopération, de la valeur coordination, voire de la valeur management tout court.

Variante : ne pas confondre avec variation. Une variante, c’est une version différente, par exemple d’un texte, d’un projet ou d’une machine. Une variation, c’est une légère modification, une transformation, un passage d’un état à un autre. Comparer : « ce projet est une variante de celui que j’ai présenté précédemment » ; « les variations des demandes du client rendent difficile la préparation d’une offre ».

Versatile : l’homonyme anglais déteint sur son cousin français, et c’est dommage, car le sens y perd… Versatile, en bon vieux français bien de chez nous, c’est le fait d’être changeant, instable, et franchement, ce n’est pas une qualité. De l’inconstance à l’inconsistance, il n’y a que quelques pas. En anglais, « versatile » se dit de quelqu’un dont on apprécie les goûts éclectiques, les connaissances variées, les aptitudes diverses. Rien à voir avec son muscadin de cousin français. He is versatile : il se plie à tout. NB : le français versatile se traduit en anglais par « volatile ».

Veto : sans accent sur le e, invariable. Des veto comme je l’écris. Pourquoi vidéos et pas vétos ? Petitesse et mystère de l'orthographe. Vexing : encore un mot anglais qui peut se traduire par de réjouissants contresens. "A vexing question", ce n’est pas une question qui fâche, comme j’en ai rencontrée une avec perplexité dans une traduction très ambitieuse, mais malheureusement pleine de fantaisies linguistiques non assumées, pour le dire dans le style du traducteur, qui aurait dû plutôt parler d'une "question délicate" ou d'un "problème épineux".

Viable ou vivable : une entreprise viable est une entreprise appelée à se développer, à durer (le contraire est une entreprise non viable, par exemple parce qu’elle accumule les pertes). Une monde vivable est un monde où il est envisageable de vivre, un monde supportable, même s'il ne donne pas nécessairement envie. Le contraire se dit invivable.

Vice-president : en anglais, le titre désigne souvent un chargé de mission auprès de la direction générale, désigné par le comité d’administration qui lui remet une lettre de mission (credential) fixant le cadre de ses activités et responsabilités. Parfois des dizaines de vice-presidents dans une entreprise. On peut détecter l’importance de la fonction selon ajout de « executive » ou de « senior ».

Vidéo : des jeux vidéo, des appareils vidéo. Quand le mot est adjectif, il est invariable ; quand il est nom, il est féminin et le pluriel prend "s".

Virus : ne pas dire ou écrire virus VIH, car le sigle contient déjà l’initiale du mot. VIH = virus de l’immunodéficience humaine.

Vision : ouf, encore un vilain concept qui s’efface progressivement des discours de Noël des dirigeants. En général, je n’aime pas mieux les nouveaux, mais je trouve que celui-là a vraiment mis beaucoup de temps à se biodégrader dans les poubelles du management. Le mot désigne pourtant une vraie qualité : la hauteur de vue, ou sa largeur, sa longueur, sa profondeur ... Mais il a été trop souvent utilisé dans des discours incantatoires censés motiver les troupes. Ces discours sont fondés sur la croyance que le rôle des managers est de « donner du sens ». Comme si le sens pouvait être la propriété ou l’apanage de certains. Les bons managers font quelque chose de beaucoup moins prétentieux, mais aussi de beaucoup plus difficile : ils donnent « envie »... La qualité de leur vision et leur capacité à l’exprimer correctement font certes partie de la réussite de ce difficile exercice, mais attention aux hallucinations.

Win-win : expression parfois abusivement employée par celui qui cherche à tirer profit d’une situation où il se trouve en position de force par rapport à vous. L’anglais est révélateur. S'il utilise l’expression française gagnant - gagnant ou, encore mieux, donnant – donnant, votre interlocuteur juge sans doute que le rapport de force est équilibré, voire en votre faveur. Mais s'il passe à l'anglais, méfiance ! Vérification empirique garantie.

/ Explication théorique ? Si elle existe, elle part sans doute du constat que l’utilisation de l’anglais par les managers francophones (et sans doute le phénomène s'observe aussi dans les autres langues) est toujours corrélée à un malaise et une insécurité ; comme si la langue maternelle interdisait d’utiliser certaines expressions permises en anglais, parce que c’est la langue des affaires, de ses affaires, et qu’elle donne le sentiment d’être pro. Lorsque votre patron ou votre client truffe son discours de mots anglais, méfiance ! Si le client prononce vertueusement une phrase du genre « Dans la nouvelle configuration de notre supply chain management, nous implémentons des rapports win-win avec nos fournisseurs… » : élargissez votre base de clients d'urgence, sinon gare à vos marges et à vos commandes... Thérèse Sepulchre

12 janvier 2006 dans V | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Zèle : grève du zèle en anglais se dit « work-to-rule ».

Zéro : recommencer à zéro et repartir de zéro. On lit "je repars à zéro", et on se demande où la personne en question entend se rendre. Veut-elle retourner à son point de départ ? Si elle veut recommencer et éventuellement aller plus loin, il vaudrait mieux qu'elle reparte de zéro.

Thérèse Sepulchre

12 janvier 2006 dans Z | Lien permanent | Commentaires (0) | TrackBack (0)

Cacique : n.m, se dit d’un hiérarque (vieux chef, personnage important d’une hiérarchie, surtout politique). Se dit également du major du concours d’entrée à l’École normale supérieure, et par extension de tout concours. Aujourd’hui, on dit éléphant.

Call-center : centre d’appel. Les call-girls ne travaillent pas dans des call-centers.

Capable de : ou susceptible de ? Capable exprime le pouvoir de faire une action : Cet homme est capable de tout. Tandis que susceptible exprime la possibilité de subir quelque chose : cet enfant est susceptible de s’ennuyer. Capable exprime aussi une capacité permanente : le service est capable de traiter 10 000 demandes par jour. Susceptible s’emploie pour parler d’une possibilité occasionnelle : elle est susceptible de travailler dans un autre service.

Capacité : en français, on désigne ainsi la propriété de contenir quelque chose, et au figuré la puissance de faire quelque chose. Capacité de produire, d’apprendre. Capacité de travail. Attention à l’anglais « capacity » qui parfois se traduit mieux par aptitude, faculté, mérite, talent, valeur.

Capturer des proies ou des prisonniers, voire un navire ; mais au sens figuré, éviter les captures incongrues et écrire capter l’intérêt, l’attention ou la confiance, conquérir ou gagner des parts de marché, de nouveaux clients...

Censé : voir « sensé » si hésitation. Censé vient du verbe « censer », mot défunt qui signifiait estimer, juger. Censé est toujours suivi d’un infinitif (rarement sous-entendu) : il est censé (être) à Paris ; elle est censée connaître le règlement. Pas de « de » avant l’infinitif. Sensé signifie simplement doué de bon sens.

Challenge : se dit très bien, malgré les cris des puristes qui le dénoncent comme anglicisme, dans le sens d’une entreprise difficile dans laquelle on se lance pour gagner, comme par défi. Exploit, gageure, performance. Le mot anglais vient d’ailleurs du français. Mais éviter de challenger quelqu’un ou quelque chose, au lieu de mettre au défi (une personne, une équipe), concurrencer (quelqu’un ou un projet) ou mettre en cause une idée…

Changement : attention aux clichés véhiculés subrepticement par ce concept : changement du changement (avant, bien sûr, les choses changeaient, mais c’était en somme toujours la même chose : aujourd’hui, ce n’est plus pareil) ; dramatisation du changement (avant, les choses changeaient, mais ce n’était pas si grave que cela : aujourd’hui, le changement est brutal, chaotique, destructeur) ; complexification du changement (avant, les choses changeaient, mais tout restait simple, accessible : aujourd’hui, le changement est devenu un vrai casse-tête) ; continuité du changement (avant, les choses changeaient de temps en temps : aujourd’hui on n’a plus jamais la paix) ; accélération du changement (avant, les choses changeaient, mais tout doucement , on avait le temps de s’y habituer : aujourd’hui, tout change à toute vitesse). Etc. Quand vous relisez un paragraphe que vous avez commencé à écrire par des considérations générales sur le changement, n’hésitez pas à le biffer et vous verrez comme vous y gagnerez en légèreté et limpidité. D’autres concepts se prêtent à des généralités aussi ineptes : concurrence (toujours plus rude), complexité (tout se complique), météorologie (les saisons ne sont plus ce qu’elles étaient), mondialisation et globalisation ( toujours plus mondiale ou plus globale, de plus en plus pleines de défis, d’opportunités ou de menaces selon l’interlocuteur).

Chairman of the board : l’anglais ou l’américain se traduit par "président du conseil d’administration". Chief Executive Officer est l'équivalent du directeur général (remarquer l’absence de majuscule en français). Président-directeur général (remarquer la place du trait d’union) se traduit par "chairman" et CEO (les fonctions sont apparemment moins souvent dissociées qu'en Europe).

Chiffre : éviter de commencer une phrase par un chiffre arabe. Au lieu de « 35 % des Français voteront X aux prochaines élections » écrire : « Plus d’un tiers des Français ». Au lieu de « 20 % de chiffre d’affaires …», écrire « Une augmentation (ou une part, une diminution, etc.) de 20 % du chiffre d’affaires…» Tournez, tournez la phrase, il y a toujours moyen de la commencer autrement (comme Beaux yeux d’amour Marquise me font mourir).

Avant une unité de mesure ou un symbole, écrire les chiffres en chiffres arabes (12 m, 360 °, 120 l, 260 €). En-dessous d'une dizaine d'éments, écrire les chiffres en toutes lettres : quatre vaches, trois hommes, cinq fleurs : mais un contingent de 10 000 hommes, un effectif de 30 000 salariés, un PME comptant 120 personnes, etc.

Circonlocution : périphrase (pour dire en quelques mots ce qu'on ne veut ou ne peut dire en un mot). En général énervante mais irremplaçable quand on veut faire de belles phrases : le Pays du milieu (pose mieux celui qui de prononce au lieu de dire bêtement Chine). Ne pas confondre avec circonvolution. Circonscrire : délimiter (un espace), cerner (un sujet). Ne pas confondre avec circoncire, cela fait mal.

Clé : éviter d’en mettre partout. Une idée, un facteur, un élément clé peut aussi être central, critique, crucial, essentiel, fondamental, déterminant. Pour le facteur clé de succès, rendez-vous à killer app.

Client : certaines directions de communications mal avisées essaient depuis quelques années de mettre ce mot partout et de faire disparaître usager, consommateur, utilisateur, passager, etc. Sans doute pour pouvoir étaler plus commodément la tarte à la crème du « client roi », parler plus onctueusement de satisfaction ou de relation client, et tartiner d’excellence commerciale n’importe quelle offre … Maintenant, on est plus usager de la RATP, (ou voyageur de la SNCF) mais client… Comme si on avait le choix du transport public pour se rendre dans des endroits improbables de la région parisienne, par exemple. Quand je me sers d’un verre d’eau au robinet, je suis maintenant « cliente » de la Lyonnaise des Eaux ou de Veolia, comme si je pouvais choisir ma pompe si l’envie m’en prenait. J’ai même entendu parler d’un projet de remplacer le mot contribuable par l’expression client du service des contributions… Non seulement le client est celui qui paie, mais aussi celui qui décide ; il est censé être libre d’aller voir ailleurs, de définir lui-même le niveau de sa satisfaction ou de se passer du service proposé (c’est pourquoi on n’est jamais client d’un médecin, mais son patient) …

En anglais, où l’on apprend souvent autre chose sur notre langue que le sabir prétentieux des écoles de commerce françaises, je suis parfois « customer » (quand je fréquente une magasin, quand je vais à la banque ou chez le coiffeur), « client », quand je m’adresse à un avocat, « guest » ou « patron », quand je vais à l’hôtel, « passenger » quand je suis dans le taxi qui m’y mène, etc.

Petit truc de traduction : My company deals mainly with firms : nos clients sont essentiellement des entreprises ("nous sommes dans le B to B", comme on dirait aujourd’hui, ne pas confondre avec B & B).

Concurrence / compétitivité : attention quand on traduit l’anglais competition, (competitor, competitive, et autres dérivés). Concurrence, concurrent, concurrentiel traduisent l’idée de rivalité et des rapports qui peuvent exister entre rivaux. Compétition, compétitif, et compétitivité traduisent l’idée, proche de la précédente, « qui peut supporter la comparaison ou la concurrence ». Dire avantage concurrentiel, prix compétitif, concurrence déloyale, etc.

Marché compétitif : où la concurrence est possible.

Marché concurrentiel : où la concurrence s’exerce (la distinction est mince, de toute façon l’anglais utilise toujours competitive market).

Conjecture : hypothèse, supposition, prévision, par opposition à certitude, conviction, évidence. Ne pas confondre avec conjoncture.

Conjoncture : en économie, état, situation qui résulte d’un ensemble de circonstances. Par opposition à « état structurel » (durable). État de la conjoncture est un pléonasme vieux et vieilli. Par souci d'euphonie, évitez aussi "les conjectures sur la conjoncture".

Confiance : toujours en crise (comme les repères, toujours perdus). Crise de la confiance, perte des repères, lieux communs du politiquement correct. Véritable marronnier des revues de management et des préoccupations des managers. Marronnier est un terme employé dans la presse pour désigner les sujets qui reviennent régulièrement en une des journaux ou en couverture des magazines. Parce qu’ils ne sont jamais épuisés et parce qu’ils garantissent un chiffre de ventes élevé au numéro. Marronnier type : le salaire des cadres, le régime avant l’été, le mal de dos, comment payer moins d’impôts. On n’échappe pas au marronnier. Pas plus qu’à la crise de la confiance, régulièrement sujet ou titre de conférence, de table ronde, de grandes messes patronales ou syndicales. La confiance, capter la confiance, la donner, en avoir ou pas, faire ou ne pas faire confiance, gros marronnier à l’ombre duquel palabrent philosophes, capitalistes, gourous en management, conseillers en communication... Pour les dirigeants, il s’agit toujours de donner confiance et de solliciter du peuple des dirigés (salariés, actionnaires minoritaires, clients et sous-traitants) qu’il fasse confiance. Pour les clients, c’est avoir confiance qui pose problème. Les salariés aimeraient qu’on leur fasse plus confiance et en recevoir des preuves de la part de ceux à qui ils sont censés faire confiance. Ce n’est pas toujours gagné...

Consistant : on dit bien d’un plat ou d’un repas qu’il est consistant, comme d’une idée ou d’une argumentation. Mais attention en traduisant l’anglais « consistency » de ne pas confondre consistance et cohérence.

Considérer : considérer le pour et le contre, considérer une chose sous tous ses aspects ; considérer un point ; considérer la situation (l’étudier pour la prendre en compte ultérieurement). Mais éviter de considérer un problème quand il s’agit simplement de l’examiner ou de considérer un mouvement s’il s’agit de l’envisager (bref, méfiez-vous de la fausse proximité de l’anglais consider).

Consolider : on consolide des comptes ou des bilans, mais on concentre un secteur, on renforce des activités ou des compétences.

Construction : quelques traductions glanées ici et là

Design Department : bureaux techniques

Tunnels : travaux souterrains

Roads / Bridges : ouvrage d’art

Earth Moving : terrassement

Dam : barrage

Harbours & Coastals : TMF

Concrete road : chaussée béton

Heavy Concrete ; grands ouvrages béton

Process : bâtiment industriel

Convaincu : on est convaincu de quelque chose (idée, opinion, argument), éventuellement par quelqu’un ou par quelque chose (un fait, un événement). Je suis convaincu de son innocence. Je suis convaincu par les arguments de la défense. Ne pas écrire comme dans cette phrase ridicule : « Paradigme omniprésent dans un échiquier concurrentiel mondial, la capacité d'innovation revêt une importance capitale pour la stratégie des entreprises. Convaincus PAR l'importance de cette mutation, X,XX,XXX s'engagent dans une stratégie d'innovation ambitieuse..... » (transmis par Dominique Michel) Conviction : dans les plaquettes en quadrichromie, et hélas aujourd’hui de plus en plus sur des sites web et même dans des blogs d’entreprise, les convictions s’étalent. Pas toujours convaincantes, les grandes convictions. Il faut bien relire les déclarations des communicants et sabrer sans état d’âmes les convictions fondées sur :

1. … des évidences (notre engagement repose sur la conviction que l’avenir se décide aujourd’hui – et pourquoi pas que la terre tourne ?).

2. des principes d’éthique élémentaire, qu’un gamin de maternelle petite section a déjà intégrés (nous sommes convaincus que le respect du client est au fondement de la qualité de notre relation – ben ça alors !)

3. des grandes phrases – « le principal, ce sont les hommes » : déjà dit, notamment par Staline, ce grand bienfaiteur de l’humanité.

4. le galimatia : « Notre réussite se fonde sur la concertation de tous les acteurs permettant d'obtenir un consensus pour conjuguer leurs efforts vers un objectif commun ». Je ne l’ai pas inventé.

5. Les déclarations inspirées: « Nous voulons adopter une stratégie de leader avec une mentalité de challenger » (je ne l’ai pas inventé non plus).

Customiser est affreux, utiliser adapter, mettre à mesure, faire sur mesure…

Core business se traduit par cœur de métier, métier historique …

Cost killer : aime mieux se dire en anglais. Tournez la phrase ou tirez-vous.

Création de valeur : grand concept vague apparu dans les années 90 et diffusé avec une grande rapidité. Ingrédient incontournable de la langue de bois. Éviter de le mettre à toutes les sauces. Mot très utile quand on relit son texte, car il signale aussi clairement que des panneaux routiers « ici, travaux ! Attention, accotements non stabilisés ! Sables mouvants : dégagez, j’ai rien à dire et il n’y a rien à penser ! » C’est la minute sacrifiée aux rituels de la communication managériale. Un bon conseil maintes fois éprouvé pour gagner en profondeur et en légèreté : supprimez tout le passage dans lequel vous parlez de création de valeur.

Croire à ou croire en : dans les formules de politesse pour conclure une lettre, faut-il écrire croire à (mes sentiments respectueux, mes sincères salutations, ma considération la plus haute, etc.) ou croire en (les mêmes choses). Il semble que la formule « croire en » soit plus appuyée, marque une profondeur, un abandon du sentiment plus complet. Dans la correspondance, le moins vaut le mieux, il faut à mon avis préférer croire à.

Thérèse Sepulchre

19 août 2007 dans C | Lien permanent | Commentaires (1)